Caméras embarquées sur des drones, reconnaissance faciale… l’espace public est de plus en plus filmé pour raisons de sécurité, mais la législation n’arrive pas à suivre, a averti mercredi la Commission nationale informatique et libertés, réclamant un débat public sur le sujet. «La Cnil a constaté ces derniers mois le développement rapide de nouveaux outils de captation et de nouvelles modalités de vidéoprotection dans l’espace public», a souligné l’instance dans un communiqué.
Or, la Cnil «constate que le cadre juridique actuel (…) n’apporte pas nécessairement de réponse appropriée à l’ensemble des techniques et usages nouveaux». «La Cnil appelle d’urgence à un débat démocratique sur cette problématique, et à ce que le législateur puis le pouvoir réglementaire se saisissent de ces questions», a-t-elle ajouté.
Plusieurs affaires liées au développement des techniques de vidéoprotection ont défrayé la chronique ces derniers mois En mars dernier notamment, la Cnil a interdit à la ville de Nice de poursuivre le test de Reporty, une application israélienne permettant de transmettre en direct à la police des vidéos d’incidents dont chacun peut être témoin, de la crotte de chien non ramassée par son propriétaire à l’agression ou l’attentat. Furieux, le maire de Nice Christian Estrosi avait reproché à la Cnil d’être «un frein dans le développement de nouveaux moyens de lutte contre le terrorisme», accusant le gendarme des données personnelles de «ne pas savoir vivre avec son temps».
Selon la Cnil, le droit actuel n’est pas complet sur cette question de l’usage des smartphones des particuliers à des fins de vidéoprotection. Il n’est pas complet non plus pour certains usages des caméras piéton (portées par des policiers ou des pompiers), ou pour les caméras embarquées sur les aéronefs (avions, hélicoptères, drones…).
Des questions se posent également sur l’utilisation des caméras pour analyser les comportements (repérer un attroupement, un mouvement de foule), ou identifier des personnes grâce à la biométrie. «Il y a des technologies sur lesquelles le droit est muet» et «il y a des usages pour lesquels le droit n’a pas été écrit», a déclaré Jean Lessi, le secrétaire général de la Cnil.
«Il y a un débat public, politique à avoir, et puis après il y aura une traduction juridique à apporter, en modifiant la loi et les décrets», a estimé M. Lessi. «Ce ne sont pas des question juridiques, ce sont d’abord des questions de société: qu’est ce qu’on veut faire avec la vidéo en France en terme de sécurité publique», a-t-il souligné.