La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné mardi la Belgique pour atteinte à la liberté d’expression, dix ans après que la justice eut interdit à la télévision publique RTBF de diffuser un reportage, à la demande d’une personne mise en cause. L’affaire concerne un reportage d’investigation qui devait être diffusé le 24 octobre 2001 dans l’émission «Au nom de la loi», qui était consacré aux risques médicaux et aux difficultés de communication entre médecins et patients. Un neurochirurgien, qui s’estimait injustement et gravement mis en cause dans ce reportage, avait obtenu d’un tribunal de Bruxelles, statuant en référé, qu’il en interdise la diffusion – alors même qu’il n’avait intenté aucune action contre des journaux qui avaient également relayé des accusations à son encontre. A l’époque, la RTBF avait crié à la «censure». Elle avait contesté cette décision en appel puis en cassation, en vain: la justice belge avait considéré que les juges des référés avaient le droit d’ordonner des restrictions préventives à la liberté d’expression dans des «cas flagrants de violation des droits d’autrui». Une analyse rejetée mardi par les juges européens: la convention européenne des Droits de l’homme, observent-ils, stipule que les restrictions à la liberté d’expression ne sont possibles que si elles sont clairement «prévues par la loi». Or en l’espèce la loi et la jurisprudence belge sont trop imprécises en la matière, a estimé la CEDH. De plus, l’interdiction a priori d’un reportage doit s’inscrire «dans un cadre légal particulièrement strict», car «l’information est un bien périssable dont l’intérêt est susceptible de pâtir même du plus petit retard», a ajouté la Cour de Strasbourg.
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