Meta (Facebook et Instagram) est visé par une plainte d’associations de défense des consommateurs de 19 pays européens, dont UFC-Que choisir en France, déposée auprès de l’UE contre son modèle «injuste» d’abonnement pour ne pas être ciblé par la publicité, ont-elles annoncé jeudi. La plainte a été déposée par le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) pour infraction aux règles européennes qui protègent les consommateurs. «Meta déploie actuellement des modifications de ses services dans l’UE qui demandent aux utilisateurs de Facebook et Instagram soit de consentir à l’exploitation de leurs données personnelles par l’entreprise, soit de payer pour ne pas recevoir de publicités. C’est un choix injuste», accuse le BEUC dans un communiqué. Depuis début novembre, les utilisateurs majeurs de Facebook et Instagram dans l’UE, en Suisse et dans le reste de l’Espace économique européen (Islande, Norvège, Liechtenstein) peuvent «continuer à utiliser gratuitement» ces services en consentant à livrer leurs données personnelles, ou décider de «s’abonner pour ne plus voir de publicités» personnalisées. Les plaignants déplorent que les consommateurs ne puissent plus utiliser ces plateformes tant qu’ils n’ont pas fait leur choix. D’après eux, cela «constitue une pratique agressive dans la loi européenne sur la consommation. En persistant et en créant un sentiment d’urgence, Meta pousse les consommateurs à faire un choix qu’ils pourraient ne pas vouloir faire». «De plus, beaucoup de consommateurs pensent probablement qu’en choisissant l’abonnement payant tel qu’il est présenté, ils obtiennent une option favorable au respect de leurs données personnelles, avec moins de traçage et de profilage», analyse le BEUC. «En vérité, les utilisateurs ont toutes les chances de voir leurs données collectées et utilisées, mais pour des objectifs autres que la publicité», ajoute-t-il. Selon un communiqué de l’UFC-Que Choisir, qui a saisi en France la Répression des fraudes (DGCCRF), «les consommateurs sont trompés par la plateforme quant à ses pratiques de pistage en ligne». Pour l’association, l’utilisation dite «gratuite» des applis ne l’est pas vraiment, car la fourniture des données personnelles «a déjà été qualifiée par une décision de justice antérieure comme une forme de contrepartie». «Le tarif de base de l’abonnement débute à 9,99 euros pour l’utilisation d’un seul compte souscrit sur la version web de la plateforme, et atteindra, à partir de mars 2024, 20,99 euros mensuels pour un utilisateur faisant usage simultané de Facebook et Instragram, et souscrivant via l’application», détaille-t-elle. Une association autrichienne, noyb, avait déjà annoncé mardi une plainte pour des motifs semblables. «Si Meta s’en sort, ses concurrents ne tarderont pas à lui emboîter le pas», avait alerté cette association fondée par le juriste autrichien Max Schrems. Début novembre, le Comité européen de la protection des données a interdit à Meta tout usage des données personnelles à des fins de ciblage publicitaire, sauf consentement explicite. Or, Meta, dont le modèle économique est dépendant de la très lucrative publicité ciblée, espérait que la mise en place de ses abonnements équivaudrait à obtenir le consentement des utilisateurs gratuits. Meta a été sanctionné en début d’année d’une amende de 390 millions d’euros pour avoir utilisé les données de millions d’Européens sans demander formellement leur accord, portant à plus de 2 milliards d’euros le total des sanctions financières prononcées à son encontre depuis un an en Europe. Celles-ci font l’objet d’appels. Facebook et Instagram comptent respectivement 144 et 133 millions d’utilisateurs réguliers en Europe hors Royaume-Uni, selon Insider Intelligence.