Porté par des formats incarnés, une stratégie multi-plateformes affûtée et un nouvel habillage vidéo, Le Parisien renforce son empreinte dans l’univers numérique. À la tête de cette transformation, Pierre Chausse, Directeur délégué de la rédaction, détaille les fondations de cette réussite, les choix éditoriaux qui l’accompagnent, et les ambitions du journal en matière de contenus, d’engagement… et de monétisation.
Vous avez réalisé plus de 455 millions de vidéos vues en mars dernier. Un chiffre impressionnant… Quelles sont les clés du succès de la stratégie vidéo du Parisien ?
C’est effectivement un cap important. Nous ne pouvons pas encore dire que Le Parisien est un média «vidéo first», mais la vidéo occupe désormais une place centrale dans notre offre. Elle devient presque notre premier point de contact avec les internautes. Notre succès repose sur une stratégie engagée depuis plusieurs années. Il y a plus de dix ans, on croyait encore qu’il suffisait de donner un smartphone à un journaliste ou de convertir un photographe en vidéaste. Mais très vite, nous avons compris qu’il fallait une équipe dédiée, avec une approche éditoriale spécifique, et non simplement des compétences techniques. La vraie montée en puissance a commencé quand notre équipe vidéo a acquis une forme d’indépendance éditoriale. Elle a cessé de simplement «illustrer» les sujets du journal pour proposer ses propres formats, pensés directement pour le web.
Quels formats ont particulièrement tiré cette croissance vers le haut ?
Nous avons plusieurs approches complémentaires. D’un côté, une production dite «desk» : de l’actu chaude, des prises de parole, des conférences de presse, du live – en s’appuyant sur des flux ou des images déjà disponibles. Et de l’autre, une vraie stratégie de formats originaux et incarnés, notamment pour YouTube. Des formats comme «Foodchecking» ou «Biclou» ont été lancés il y a plusieurs années, avec déjà des vidéos de 8 à 10 minutes. À l’époque, on nous disait que personne ne regarderait un format aussi long. Aujourd’hui, on nous explique qu’il ne faut faire que du 15 à 20 minutes… Et le public consomme de plus en plus ces formats longs sur sa télévision connectée. Nous avons toujours évité de singer la télévision. On a préféré se concentrer sur des formats souples, incarnés, cohérents avec les codes du web.
Vous allez entrer dans une nouvelle phase ?
Oui, tout à fait. Dans les mois qui viennent, nous allons lancer un projet éditorial encore plus ambitieux. L’idée est de développer davantage de formats longs, en cohérence avec une tendance de fond, notamment sur YouTube. Nous allons créer un nouveau studio – modulaire, sans rapport avec les codes télé – en partenariat avec l’agence Sixtine. Ce studio nous permettra notamment de développer des podcasts filmés. «Code Source» et «Crime Story», deux de nos marques fortes en podcast, sont dans le top 5 des podcasts natifs. L’objectif est de les rapprocher de la vidéo pour leur donner une nouvelle dimension.
Un nouvel habillage vidéo a également été mis en place début avril. Quelle était la logique derrière cette refonte ?
La production vidéo s’est beaucoup accélérée ces dernières années, avec une identité visuelle parfois maltraitée. Il était temps d’harmoniser tout ça. Le nouvel habillage permet de marquer davantage nos formats, de rendre leur reconnaissance immédiate, et de poser les bases pour les nouveaux programmes à venir. Il y a aussi une cohérence que nous souhaitons retrouver entre tous nos contenus : vidéo, print, infographies… Par exemple, une infographie utilisée dans une vidéo doit reprendre les mêmes codes que celle publiée dans le journal. Nous avons aussi travaillé des éléments spécifiques pour les réseaux sociaux – notamment les teasers – pour optimiser la circulation entre nos plateformes.
Votre communauté sociale atteint 17 millions d’abonnés. Comment articulez-vous votre stratégie de contenu entre TikTok, Instagram, Facebook, X… ?
Nous avons une organisation en deux pôles : une équipe dédiée aux réseaux sociaux, et une autre à la vidéo. TikTok, Instagram, Snapchat et YouTube sont plutôt gérés côté vidéo, tandis que Facebook et X le sont en lien avec le service social media. L’enjeu est double pour nous sur ces plateformes : d’un côté, diffuser notre production vidéo, mais aussi faire vivre nos articles, notre offre éditoriale au sens large.
Le format TikTok ou Insta Reels influence-t-il vos choix éditoriaux ?
Oui, dans la manière de raconter une histoire, et parfois même dans le choix des sujets. Certains thèmes sont plus adaptés à certaines plateformes. L’audience détermine en partie notre façon de faire, même si on garde évidemment une rigueur éditoriale et une ligne cohérente.
Peut-on s’attendre à de nouveaux formats incarnés ?
Oui, absolument. Nous avons lancé il y a quelques semaines un nouveau format intitulé «Le Touriste», porté par Mathieu Hennequin. Il enquête sur les arnaques auxquelles les touristes peuvent être confrontés à Paris. L’un des grands projets à venir est d’adapter «Code Source» et «Crime Story» en formats vidéo. Ce sera l’un des enjeux de la rentrée. Et oui, d’autres projets sont en chantier, mais encore un peu tôt pour en dire plus…
Enfin, quelles sont vos ambitions en matière de monétisation des contenus vidéo ?
Depuis deux ans, nous avons développé une activité de brand content en forte croissance. Cette activité est pilotée par une rédactrice en chef intégrée à la rédaction. Elle est la garante de la cohérence éditoriale de ces vidéos avec l’univers du Parisien. Notre puissance sur les réseaux nous aide aujourd’hui à proposer des dispositifs solides aux marques, tout en restant fidèles à notre ligne.