Un documentaire disponible depuis jeudi sur Netflix revient sur l’affaire Florence Cassez, la Française détenue pendant 7 ans au Mexique, et sur la «corruption» d’une justice de plus en plus dénoncée par les Mexicains eux-mêmes. La co-production franco-mexicaine retrace l’histoire d’une jeune femme de 31 ans, arrêtée avec son ex-fiancé mexicain Israel Vallarta, 35 ans, au sud de Mexico le 8 décembre 2005. «Je me suis faite kidnapper», dénonce Florence Cassez, qui a refait sa vie en France depuis neuf ans. Jetés en pâture à l’opinion traumatisée par la violence, Vallarta est accusé – sous la torture – d’enlèvements avec sa complice. Trois pseudo-otages sont libérés lors de la reconstitution de leur arrestation pour les besoins des caméras de télévision 24 heures plus tard. La Française sera condamnée à 96 ans de prison, peine réduite à 60 ans juste avant une visite officielle de Nicolas Sarkozy en 2009. «Rien de ce qui a été fait avec Florence Cassez ne s’apparente à de la justice», se souvient dans le film l’ex-président français (2007-2012), qui a demandé son transfert dans une prison en France. Florence Cassez est libérée en 2013 sur décision de la Cour suprême pour des vices de forme. L’enquête a été entachée par un «effet corrupteur», déclare l’actuel président de la Cour, Arturo Zaldivar, qui cite «une série de violations des droits de l’homme» : arrestation sans mandat d’arrêt, non-présentation au parquet, etc. L’utilisation de l’expression «effet corrupteur» est une «première dans l’histoire juridique du pays», selon l’écrivain Jorge Volpi, dont le livre («Un roman mexicain. L’affaire Florence Cassez») a inspiré le film. La corruption entache toute l’affaire, si bien «qu’il est impossible de savoir la vérité», décrypte Jorge Volpi. Moins soutenu que Cassez, Israel Vallarta attend toujours son procès en prison près de 17 ans après l’exhibition médiatique du pseudo «couple diabolique». «Si on trouve des éléments suffisants pour prouver son innocence, on va solliciter sa remise en liberté», a déclaré le président Andres Manuel Lopez Obrador en 2021. Israel Vallarta «a été victime de tortures», a reconnu en 2021 le gouvernement, ajoutant qu’il ne peut être libéré car il est poursuivi dans deux autres affaires d’enlèvements – ce que nie sa famille. Le film explique que Cassez-Vallarta auraient été victimes de la vengeance d’un ex-associé du frère de la Française, également établi à l’époque au Mexique. Les mentalités évoluent. «Tout le monde croyait qu’ils (Cassez et Vallarta) étaient coupables», se souvient Emmanuelle Steels, correspondante de plusieurs médias francophones au Mexique depuis 2008, auteur d’une contre-enquête sur l’affaire. Depuis, les Mexicains «ont pris conscience qu’il y avait beaucoup d’arrestations arbitraires et illégales, de cas de tortures et de fabrication de coupables», ajoute la journaliste belge, qui apparaît dans le film et dont le propre livre sur l’affaire doit paraître prochainement en France. Les deux responsables sécuritaires qui avaient organisé l’arrestation de Cassez et Vallarta sont aujourd’hui en détention préventive, dont l’ancien ministre Genaro Garcia Luna, emprisonné aux Etats-Unis pour des liens présumés avec le cartel de Sinaloa du Chapo Guzman. Le documentaire sort au moment où le gouvernement mexicain vient de reconnaître officiellement un «crime d’Etat» dans une autre affaire emblématique, la disparition de 43 étudiants en septembre 2014 dans l’Etat du Guerrero. Placé en détention provisoire, l’ex-procureur général sera jugé pour «disparition forcée, torture et délits contre l’administration de la justice», a annoncé mercredi la justice.Il avait contribué à élaborer la «vérité historique» sur le sort des 43 étudiants. Cette version exonérait les forces de sécurité, désormais officiellement accusées.
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