416 Prod est née de l’envie d’explorer des vies atypiques, souvent incomprises, des réalités méconnues, trop peu visibles dans les médias. Entretien avec sa fondatrice et directrice générale, Mélissa THEURIAU.
MEDIA +
Depuis 2008, la teneur sociétale de vos films documentaires est très forte…
Mélissa THEURIAU
Oui, car j’essaie de rester cohérente dans les engagements. Au lancement de 416 Prod, je suis allée chercher une liberté éditoriale dont j’avais besoin. Film après film, nous tirons un fil autour de la protection des plus fragiles. C’est ce qui me nourrit ! Nous sommes dans l’observation ou l’amorce de solutions qui permettent de regarder les choses avec un peu d’espoir, ou au contraire de dénoncer des situations qui nous révoltent. Mais toujours avec le prisme de voir la lumière au bout du tunnel.
MEDIA +
Diffusion ce mercredi 9 novembre à 23h05 de «Harcèlement scolaire : les indiens contre-attaquent» sur France 2. Quelle liberté avez-vous en 2ème partie de soirée ?
Mélissa THEURIAU
Ma relation avec France Télévisions est précieuse. Ils connaissent notre travail depuis quelques années et nous laissent une grande liberté de point de vue. La gestation d’un documentaire c’est environ deux ans. Ce qui permet une réflexion qui déconstruit souvent certains préjugés. Ce qui est valorisant, c’est d’être programmé dans le cadre d’une soirée thématisée. C’est le cas ce mercredi avec la diffusion en Prime de «La vie scolaire», suivi de notre documentaire réalisé par Guillaume Estivie. Cette fois-ci, on propose une autre façon d’appréhender le harcèlement, l’isolement et la souffrance à l’école. Emmanuelle Piquet, thérapeute spécialisée de la question, a élaboré une stratégie de défense basée sur la répartie et l’autodérision. Nous avons suivi quatre élèves victimes de harcèlement scolaire, qui vont se révéler au gré des séances.
MEDIA +
Ce qui vous plaît, c’est finalement de questionner le parcours social d’individus …
Mélissa THEURIAU
Je crois en l’humanité. Tout le monde peut évoluer. Nous pouvons réussir à aider, y compris ce que l’on appelle «les causes perdues». Tout dépend du regard que l’on porte et des moyens que l’on consacre. Il s’agit aussi d’essayer de provoquer une résonance politique dans les films initiés. Si j’ai la confiance du ministère de la justice ou d’une administration pénitentiaire, c’est parce qu’ils savent comment nous travaillons, avec toujours un long temps d’observation et une captation la plus juste possible du milieu investi.
MEDIA +
Vous êtes donc une productrice militante ?
Mélissa THEURIAU
On peut tout mettre dans ce terme. Je continue de diriger une société de production artisanale. Nous ne produisons pas 20 films en même temps, même si nous avons déjà diffusé plus d’une vingtaine de documentaires, j’accompagne chacun d’eux avec la même attention. Je les initie souvent. Je réfléchis et j’observe des dispositifs qui redonnent un peu d’espoir en l’avenir. Et nous aimons être bousculés en faisant voler en éclat des idées reçues, tenaces et largement partagées. France 2 diffuse mercredi 16 novembre un de nos films réalisés par Florie Martin : «Combattre leur violence» qui suit un groupe de paroles destiné aux auteurs de violences conjugales.
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Et les magazines ?
Mélissa THEURIAU
Produire et incarner un magazine portant une autre écoute, j’adorerais. Il y a des tas de thèmes qui mériteraient des interviews approfondies. En attendant, on a beaucoup de documentaires en cours de tournage.
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Quels sont les documentaires en tournage ?
Mélissa THEURIAU
Le premier est un film de 60’ pour ARTE : «Le bonheur viendra après» (titre provisoire) qui parle du quotidien d’un «premier de corvée», cette immense minorité de travailleurs n’ayant pas toujours de papiers mais qui font tourner la France : livreurs, plongeurs… On suit le parcours d’un jeune homme d’origine malienne qui travaille dans les cuisines d’un grand restaurant parisien. On veut capter la vie complexe et millimétrée de ceux qui sacrifient leur vie pour réussir à nourrir les leurs. Le deuxième film pour France 2 va s’intéresser au parcours de plusieurs bébés placés, soit à la naissance pour maltraitance, soit accueillis parce que «nés sous X».