Alors que les marchés occidentaux arrivent à saturation en nombre de clients, les groupes de télécoms, à l’image de Vivendi qui veut racheter l’opérateur brésilien GVT, partent depuis plusieurs années à la chasse à la croissance dans les pays émergents. Jusque-là, chacun avait son terrain de jeu: si France Télécom misait surtout sur l’Afrique, Telefonica avait fait de l’Amérique du Sud sa spécialité tandis que Vodafone essaimait dans le Commonwealth (Inde, Australie, Afrique du Sud…). Des positions héritées du passé colonial de ces régions. Aujourd’hui les frontières semblent plus floues. Telefonica a ainsi augmenté dimanche sa participation dans l’opérateur China Unicom, passant de 5,38% à 8%. France Télécom lorgne quant à lui sur l’Asie, notamment le Vietnam où l’un des opérateurs publics doit être privatisé. Enfin, Vivendi, autrefois uniquement présent en Afrique (Mali, Mauritanie, Burkina Faso et Cameroun) via Maroc Telecom, attaque désormais l’Amérique du Sud. En juillet il avait tenté, en vain, de reprendre les actifs en Afrique de l’opérateur koweïtien Zain. L’intérêt pour les groupes télécoms est d’arriver sur des terres peu défrichées, où le fixe est quasi inexistant et le mobile présent depuis peu, bien loin des marchés occidentaux qui frôlent la saturation, avec par exemple des taux d’équipement en mobile supérieurs à 100% dans plusieurs pays d’Europe. Le potentiel de croissance est donc énorme dans ces «nouveaux» pays: ainsi le taux de pénétration de la téléphonie mobile est de 47,5% en Chine, de 29,5% en Inde et de seulement 18% à Madagascar. Selon les chiffres publiés en 2008 par l’Institut des télécoms et de l’audiovisuel en Europe (Idate), les marchés des télécoms matures avancent moins vite que les émergents, avec des croissances faibles en Europe (+3,4%) et en Amérique du Nord (+2,9%), moyennes en Asie-Pacifique (+6,2%) et fortes en Amérique latine (+10%) et en Afrique-Moyen-Orient (+13,5%). Certes, les revenus moyens par client sont faibles, moins de 10 euros en moyenne contre environ 30 euros dans les pays occidentaux selon l’Idate, mais les opérateurs font un investissement sur l’avenir, misant sur l’enrichissement des populations qui dépenseront de plus en plus. Ils réduisent aussi au maximum leurs dépenses commerciales, pour préserver leur rentabilité: ainsi, au premier semestre, France Télécom a affiché une marge, dans sa zone «Reste du monde», de 40,8%, contre 34,7% pour l’ensemble du groupe.