Les opérateurs lancés dans la course à la connectivité satellite

Pas d’antenne encombrante, d’abonnements coûteux, mais une connexion 5G dans des zones reculées avec un smartphone classique : au MWC de Barcelone, les opérateurs sont lancés à pleine vitesse dans la course à la connectivité satellite. A l’occasion du grand rassemblement annuel du secteur des télécommunications et des services connectés, la start-up californienne Skylo présentait son service de messages d’urgence satellites via des téléphones 5G, fruit d’un partenariat avec l’opérateur américain Verizon et l’allemand Deutsche Telekom. Sur son stand, la liaison s’établit sur les téléphones d’exposition avec des satellites situés à des centaines ou des milliers de kilomètres en orbite – beaucoup plus loin que les quelques kilomètres habituels vers une tour cellulaire. Pour parvenir à se connecter à cette distance avec de simples smartphones, Skylo a réussi à «transformer un problème matériel en un problème logiciel», déclare son PDG Parth Trivedi. L’entreprise a découvert qu’elle pouvait utiliser les composants déjà présents dans les téléphones les plus récents pour communiquer avec les satellites. Les modifications sont «entièrement basées sur le logiciel embarqué et le code». Skylo devra néanmoins faire face à «de nombreux défis d’ingénierie» pour franchir les prochaines étapes qu’elle s’est fixées : après les messages d’urgence, elle veut généraliser l’envoi de SMS puis passer des appels via satellite. «Tous les acteurs progressent vite parce qu’ils comprennent qu’il y a une grande opportunité», commente Suman Sharma, directeur principal de la gestion des produits chez le fournisseur d’infrastructure réseau Mavenir. Alors que les services satellites pour le grand public restent relativement limités – Apple permet, par exemple, aux utilisateurs d’iPhone d’envoyer des messages d’urgence via un partenariat avec l’entreprise Globalstar -, le marché à prendre est important. Les opérateurs de satellites et de réseaux mobiles considèrent les services 5G par satellite – aussi appelés «réseau non terrestre» (NTN) – comme un moyen d’atteindre environ 400 millions de personnes qui n’ont aujourd’hui aucun accès mobile. «Tout le monde travaille à obtenir» des messages et des appels via satellite, ce qui sera probablement «une réalité dans 2 ou 3 ans», indique Luke Pearce, analyste chez CCS Insight. Mercredi, les entreprises Ericsson, Qualcomm, et Thales Alenia Space, qui avaient annoncé nouer un partenariat en 2022, ont indiqué qu’une nouvelle étape de connexion 5G satellite sur un smartphone classique avait été franchie. Mais l’adoption généralisée de la technologie, une fois celle-ci aboutie, sera dépendante du marché des smartphones, souligne Luke Pearce. Seuls les modèles les plus récents peuvent en effet être connectés via satellite et leur adoption par les consommateurs est «un peu lente», constate l’analyste, notamment en raison d’un attrait croissant pour les téléphones d’occasion. La plupart des fabricants de composants prévoient d’adapter leurs produits à la 5G NTN d’ici 2026 à 2027, souligne M. Sharma. Dans cette course, les opérateurs commerciaux et les opérateurs d’infrastructures ont tous un même but : être les 1ers à offrir cette technologie au public, afin de bénéficier du retour sur investissement le plus avantageux possible. Certains opérateurs n’ont ainsi pas attendu le développement de technologies conformes aux normes développées par l’organisme industriel mobile 3GPP, comme celle que cherchent à déployer Skylo et Ericsson. Aux Etats-Unis, l’opérateur T-Mobile a ainsi noué un partenariat avec l’entreprise de satellites Starlink, détenue par Elon Musk, et propose à ses clients un accès au réseau satellites à 15 dollars par mois. Mais la ligne d’arrivée n’est pas encore franchie: des solutions comme celles de Starlink ou de son concurrent AST Space Mobile occupent des fréquences réseaux partagées avec le reste des opérateurs, ce qui peut ralentir les communications.

Une fois le développement d’offres 3GPP achevé, les utilisateurs bénéficieront de bandes de réseaux dédiées, et passeront du réseau terrestre au réseau satellite aussi simplement que du Wifi au réseau cellulaire, indique le dirigeant de Skylo. «Vous ne vous en rendrez même pas compte», promet-il.