Les Femmes puissantes débarquent au 77e Festival de Cannes

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Judith Godrèche, voix du mouvement #MeToo, et son court-métrage très attendu, Anya Taylor-Joy, dans le rôle-titre de «Furiosa», déclinaison de «Mad Max»: longtemps invisibilisées dans le 7e art, les femmes puissantes déboulent mercredi au Festival de Cannes. Il faut aussi mentionner, dans la même journée, une masterclass avec Meryl Streep («Sur la route du Madison», «Mamma mia»), 74 ans, légende de Hollywood qui a reçu une Palme d’Or d’honneur lors de la cérémonie d’ouverture 100% féminine, suivie par 2,3 millions de téléspectateurs. Un record, s’est félicité France Télévisions. «Tu as changé notre façon de voir les femmes, tu nous as donné une nouvelle image de nous-mêmes», l’a remercié, en pleurant, Juliette Binoche en lui remettant ce prix. «Moi aussi», réalisé par Judith Godrèche, 52 ans, sera doublement présenté: en ouverture de la sélection Un Certain Regard, au Palais des Festivals, seulement pour les accrédités, et au Cinéma de la Plage, pour les touristes et les Cannois. C’est déjà un temps fort du Festival, sept ans après la chute du producteur américain Harvey Weinstein, et 5 mois après la prise de parole marquante, en France, de l’actrice-réalisatrice qui a accusé de viols deux figures du cinéma d’auteur, Benoît Jacquot et Jacques Doillon. La comédienne a tourné ce court-métrage de 17’ pour dénoncer les violences sexuelles. Une façon de redonner un visage à un millier de victimes, a-t-elle confié. «Il y a cette idée du «comme toi, ça aussi je l’ai vécu», d’un lien, d’un écho, développe l’intéressée. L’idée, c’était de dire vous avez le droit de venir même si vous ne voulez pas être filmé, vous pouvez être de dos, vous pouvez être flouté». «Ces personnes semblent partager un même sentiment de honte. Comment transformer la honte? Pas en fierté, personne n’est fier de s’être fait abuser sexuellement. Mais partager quelque chose dont on pourrait toutes et tous se dire, «on a fait ça ensemble et on peut en être fier»». Pour Judith Godrèche, «le cinéma a une fonction symbolique, divine quasiment». «Me dire que les gens anonymes qui sont dans ce film vont être les acteurs principaux d’un film qui va à Cannes, c’est ce statut-là qui m’intéresse». Le mouvement #MeToo alimente les discussions du Festival de Cannes. «Nous continuons à débattre de ces questions ensemble notamment la question ou nous voulons qu’aille le cinéma. Il y a énormément de changements aux Etats-Unis», a commenté devant la presse Greta Gerwig, réalisatrice et présidente du jury.

«La parole a été ouverte il y a quelques années», a dit en conférence de presse l’acteur Omar Sy («Lupin»), membre du jury, qui se félicite qu’il y ait «de plus en plus de femmes qui ont le courage de dire les choses» dans une «industrie du cinéma très visible». Et sur le tapis rouge, il y aura Anya Taylor-Joy, 28 ans, une guerrière qui fait mordre la poussière aux hommes sur grand écran dans «Furiosa», présenté hors compétition en avant-première mondiale. C’est un nouvel épisode de la saga «Mad Max», plus précisément un prequel de «Fury Road» (2015), soit la jeunesse du personnage incarné alors par Charlize Theron. «Il y a 15 ans, je n’aurais pu imaginer qu’il y aurait autant de femmes dans le cinéma», s’est réjoui Greta Gerwig, 1ère réalisatrice à dépasser le milliard de dollars de recettes avec «Barbie». Il n’y a cependant que quatre réalisatrices dans les 22 films en compétition à Cannes cette année. «Quatre femmes téméraires», a glissé Camille Cottin, maîtresse de cérémonie du Festival. Dont la Française Agathe Riedinger qui ouvre le bal de la compétition avec «Diamant brut», un 1er film sur la télé-réalité et les aspirations d’une jeune fille vivant dans le sud de la France.