Le genre policier, roi de l’export pour les séries

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Roi de l’export pour les séries, le genre policier se régénère toujours, à l’instar de «Watson», tiré de l’univers de Sherlock Holmes et transposé aujourd’hui avec un acteur afro-américain en fidèle second émancipé.

– Police partout

Sur les 18 nouvelles séries qui se détachent le plus à l’export pour la saison 2023-2024, 10 relèvent du genre policier, selon une étude révélée lundi au Mipcom à Cannes, grand rendez-vous mondial de l’audiovisuel. Et peu importe qu’il y ait uniforme ou pas. «Blue lights» s’articule autour de recrues en tenue en Irlande du Nord, tandis que «The Irrational» accompagne un professeur en sciences du comportement qui collabore avec le FBI aux Etats-Unis. La série policière a toujours fait partie du paysage des séries. «Il y a cette appétence autour de l’investigation. On voit que derrière des exceptions, comme «Friends» par exemple, les comédies, c’est plus compliqué à exporter», décrypte Candice Alessandra, directrice d’études chez Glance, département international de Médiamétrie, institut de mesure français de l’audiovisuel. Et aujourd’hui, le genre policier contamine d’autres formats, comme dans le programme néerlandais «A party to die for» («Une fête à en mourir»), téléréalité-people où des célébrités doivent résoudre pour de vrai une – fausse – disparition de l’un d’entre eux.

– Watson, médecin-détective

Les matrices américaines «Les incorruptibles», série avant le film avec Kevin Costner et Sean Connery, ou «Columbo» sont remisées au placard. «On voit davantage la profondeur des personnages, avec des sujets sociétaux rajoutés autour de la résolution de l’enquête», éclaire Candice Alessandra. En témoigne le pilote de la nouvelle série «Watson» montré en avant-première au Mipcom, avant une diffusion américaine en janvier 2025. Cette fiction transposée dans le monde d’aujourd’hui, à Pittsburgh aux Etats-Unis, suit les pas du docteur John Watson, alors que Sherlock Holmes a disparu. Ce médecin, meilleur ami du célèbre détective, est incarné, petite révolution, par Morris Chestnut, acteur afro-américain révélé sur grand écran dans les années 1990 par le film «Boyz n the Hood». Le héros pousse ses collaborateurs à délaisser leurs stéthoscopes pour enquêter en dehors de la clinique afin de venir à bout de pathologies rares, leur spécialité. Mais le péril Moriarty ennemi juré de Holmes resurgit ! La couleur de peau du personnage central n’est pas brandie en étendard par ses concepteurs. «Nous avons fait table rase du passé. Vous avez toujours vu la mythologie de cet univers du point de vue de Holmes. Maintenant, c’est le point de vue de Watson», s’est contenté de commenter Morris Chestnut.

– Autres uniformes

Chez les costumiers de séries, à côté du badge policier un nouveau challenger déboule: l’insigne militaire. «On a vu sur cette saison 2023-2024 une augmentation d’un tiers des séries qui évoluent sur un terrain militaire», note Candice Alessandra. «L’actualité internationale, on le sait très bien, inspire les réalisateurs et les scénaristes. Et avec tout ce qui se passe en moment…», poursuit l’experte. Exemple de cette tendance: «Les armes» («The command» à l’international), série québécoise sur une unité ultra-secrète chamboulée par le meurtre d’un soldat sur fond de tensions canado-russes en Arctique. Mais aussi «Conflict», où une paisible péninsule finlandaise non loin de la Russie est attaquée par une force armée non identifiée qui prend des otages. Les USA jettent un oeil soucieux et l’escalade menace. Sur le terrain réel de la guerre commerciale à l’export, le Royaume-Uni a devancé en volume les Etats-Unis, fragilisés par les mouvements de grève des scénaristes l’an passé mais qui devraient reprendre le leadership l’an prochain, selon les spécialistes du marché. Donnée encore méconnue: toujours 3ème mais loin derrière ces deux géants, la Turquie produit des soap-opéras au large écho en… Amérique Latine.