La superproduction chinoise «Creation of the Gods» en salles mercredi en France et en Belgique

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Entre «Game of Thrones» et «Le Seigneur des Anneaux» à la chinoise: c’est la promesse de «Creation of the Gods», premier opus d’une trilogie historique en salles mercredi en France et en Belgique. Le film, au budget de 223 millions d’euros comme le titanesque «Avatar», a eu droit à une avant-première dans 144 cinémas français en février, à l’occasion du Nouvel an chinois. Une percée notable pour une superproduction chinoise en France, avec 15.000 entrées en deux jours. Une équipe de 9.500 personnes, 438 jours de tournage, 15.000 auditions d’acteurs… Ce long-métrage «aspire à être un film pionnier dans l’histoire du cinéma chinois en explorant le genre épique mythologique», explique le réalisateur Wuershan dans le dossier de presse du film. «Creation of the Gods» («Création des dieux») ou «Fengshen» relate le début d’une séquence historique réputée en Chine: la chute de la dynastie des Shang il y a plus de 3.000 ans. Lors d’une passation de pouvoir entre père et fils, une malédiction divine s’abat sur le royaume. Un guerrier et un des princes héritiers s’inquiètent des desseins du nouveau roi, manipulé par une femme-démon, et tentent de le combattre. Êtres immortels, créatures fantastiques et affrontements XXL assurent le spectacle mais n’allègent pas une intrigue alambiquée de plus de deux heures. L’écueil est courant pour les réalisateurs de superproductions historiques chinoises, comme «Les Trois Royaumes» sorti en 2009 en France, qui «font le postulat que le public étranger connaît déjà l’Histoire de la Chine», avait estimé en février l’Américaine Wendy Su, spécialiste du cinéma chinois. Aux États-Unis, où il est sorti en septembre, les spectateurs n’ont «pas du tout compris le scénario», selon la chercheuse de l’université de Californie à Riverside. À l’inverse, les films d’arts martiaux comme «Tigre et Dragon» (1,8 million d’entrées en France en 2000) sont plus appréciés à l’étranger, car «ils reposent sur le langage corporel: il n’y a pas besoin de lire les sous-titres pour comprendre». Mais depuis 2017, début de la guerre commerciale sino-américaine, le «climat nationaliste» imprègne le cinéma chinois et «promouvoir les films à l’étranger n’est pas une priorité», avait-elle ajouté. Les plus gros succès des dernières années en Chine, comme «Wolf Warrior» (2015) ou «La Bataille du Lac Changjin» (2021), mettent en avant une fibre patriotique qui séduit peu les autres publics. Le blockbuster de Wuershan ne va pas si loin et émet une légère critique de la vanité des puissants. Il arrive souvent que ce type de grosses productions ne quittent pas le territoire national, avait souligné en février Éric Marti, de la société d’analyse d’audience Comscore. Sorti dans 12 pays depuis l’an dernier et bientôt en Inde ou en Russie, «Fengshen» déroge quelque peu à la règle. Avec 372 millions de dollars de recettes, il était le 21e film le plus rentable au monde en 2023. Une étape supplémentaire dans la conquête chinoise du box-office mondial, selon Éric Marti. En 2020 et 2021, les recettes cinématographiques en Chine ont détrôné celles des États-Unis, conséquence du Covid mais surtout d’une «croissance assez forte» du marché local entre 2014 et 2019, avait-il analysé. Les États-Unis ont repris la tête en 2023 avec 9 milliards de dollars de recettes, devant les 7,8 milliards de la Chine, qui détient le record du nombre de salles obscures. «Le marché chinois s’est totalement émancipé» des productions américaines «et réussit des scores extraordinaires avec les films chinois», selon l’analyste. Mais il relevait qu’à l’export, ces cinéastes avaient encore beaucoup à apprendre de leurs rivaux coréens et japonais.