Un bénéfice toujours en hausse
mais une baisse de l’activité dans
les infrastructures télécoms: le
chinois Huawei, mis à l’index dans
plusieurs pays, a accusé le coup de la
vindicte des Etats-Unis l’an dernier.
Soupçonné d’espionnage potentiel au
profit de Pékin, le groupe de Shenzhen
(sud) a vu le chiffre d’affaires de
sa branche infrastructures (qui
fournit connectivité, réseaux et
périphériques) reculer de 1,3% en
- Elle avait encore gagné 2,5%
l’année précédente. Cet indicateur
dans le rouge est le premier signe
tangible de l’impact de la pression
américaine à l’encontre de Huawei,
dont les équipements, considérés
comme parmi les plus performants à
l’échelle mondiale, sont soupçonnés
par Washington d’offrir une porte
dérobée à Pékin pour potentiellement
espionner les communications des
pays qui les utiliseraient. Les Etats-
Unis n’ont jamais apporté de preuve
- du moins publiquement – pour étayer
ces accusations, mais ils pressent leurs
alliés de se passer des infrastructures
de Huawei, à l’aube du déploiement
dans le monde de la 5G, la future
génération ultrarapide de l’Internet
mobile.
Dans l’adversité… : «Les
préoccupations en matière de sécurité
ont un impact sur Huawei, car de plus en
plus de pays imposent des restrictions
sur le matériel réseau de l’entreprise»,
analyse Brock Silvers, directeur
général du cabinet Kaiyuan Capital.
Dernier épisode en date, Londres a
pointé jeudi les «nouveaux risques»
que ferait peser Huawei sur la sécurité
des réseaux de télécommunications
du Royaume-Uni. «Cette campagne
lancée par les États-Unis ne fait que
commencer et il est peu probable
qu’elle s’estompe rapidement», selon
Brock Silvers, alors que Pékin et
Washington sont engagés depuis l’an
dernier dans un bras de fer commercial
et diplomatique. L’arrestation en
décembre de la directrice financière
de Huawei à Vancouver (Canada), à
la demande de la justice américaine,
a porté un coup à l’entreprise. Meng
Wanzhou est soupçonnée d’avoir
menti à plusieurs banques pour que
Huawei puisse accéder au marché
iranien entre 2009 et 2014, en
violation des sanctions américaines.
Elle risque une extradition vers les
Etats-Unis. Lors de la publication
de ses résultats annuels vendredi, le
géant des télécoms a implicitement
reconnu des difficultés, promettant de
faire tout son possible «pour ignorer
les distractions extérieures», dans
un communiqué intitulé… «Dans
l’adversité, une croissance à la
hausse».
L’Europe, important marché : Car
en dépit de la pression américaine,
Huawei a globalement résisté. Son
bénéfice net a connu une augmentation
de 25% sur un an, à 59,3 milliards de
yuans (7,9 milliards d’euros). Ses
ventes ont également bondi (+19,5%
sur la période), largement portées par
les smartphones et autres tablettes,
qui représentent plus de 45% de son
chiffre d’affaires. Ses téléphones ont
permis à la marque de se faire connaître
du grand public à l’international,
notamment en Europe. Ce marché est
d’autant plus important pour Huawei
qu’il subit la concurrence des autres
fabricants chinois (Oppo, Xiaomi,
Vivo…) dans son pays. Cette semaine,
c’est d’ailleurs à Paris que le groupe
a lancé son P20, un smartphone dopé
à l’intelligence artificielle et doté
d’un capteur photo pouvant rivaliser
avec les appareils traditionnels. «Le
monde ne peut pas se passer de nous
car nous sommes plus avancés» que
la concurrence, avait plastronné en
début d’année le fondateur de Huawei
Ren Zhengfei dans un rare entretien
accordé à la BBC.