Des chroniqueurs qui partent en signe de solidarité, une décision qui passe mal en interne: le licenciement mardi de l’humoriste Guillaume Meurice provoque des remous à France Inter, la première radio du pays. «Le bouffon congédié, plusieurs de mes camarades ayant démissionné, ma troupe amputée, il faudra une fois encore m’adapter», a écrit l’animatrice Charline Vanhoenacker, mercredi sur le réseau social X. Elle est à la tête de l’émission d’humour «Le grand dimanche soir», passée l’an dernier d’un rythme quotidien à hebdomadaire et où officiait l’humoriste au positionnement très à gauche. Si Charline Vanhoenacker a pris «acte que celui qui a fait honneur au service public est aujourd’hui remercié», elle n’est pas allée aussi loin que plusieurs chroniqueurs. Aymeric Lompret, GiedRé, Laélia Véron ont annoncé mardi leur départ en solidarité avec Guillaume Meurice, suivis mercredi par Thomas VDB. M. Meurice a été licencié pour «faute grave» par Radio France. La présidente du groupe public, Sibyle Veil, l’accuse de «déloyauté répétée» après qu’il eut répété fin avril ses propos polémiques sur le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu tenus une première fois fin octobre. Il l’avait comparé à une «sorte de nazi mais sans prépuce», ce qui avait déclenché des accusations d’antisémitisme et une plainte, finalement classée sans suite. Cela avait aussi valu à Radio France une mise en garde de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel. Dans une «lettre à France Inter» publiée sur X mercredi matin, M. Meurice a jugé que son licenciement était une «victoire idéologique» pour «l’extrême droite». «On en rirait volontiers si l’histoire s’arrêtait à mon cas personnel. Mais le projet est global», a-t-il écrit, alors que le RN se présentera en position de force aux législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet. Sans nommer Mme Veil ni la directrice de France Inter Adèle Van Reeth, il a fustigé les «âmes de si peu de scrupules» qui dirigent selon lui la station, en leur reprochant «leur soif d’obéir» et «leur brutalité». En début d’après-midi, Adèle Van Reeth est revenue sur cette décision lors d’une réunion interne avec les salariés de France Inter. «C’était une réunion tendue, qui s’est achevée sur une incompréhension mutuelle et qui n’a rien apaisé», a raconté un membre de la rédaction sous couvert d’anonymat. «Plusieurs personnes ont pris la parole pour dire que l’affaire a été extrêmement mal gérée par la présidence et que cette décision dans ce timing nous affaiblit tous», a-t-on poursuivi de même source. Contesté à Radio France, le projet gouvernemental de fusion de l’audiovisuel public est mis entre parenthèses par les législatives. Le RN, pour sa part, souhaite une privatisation du secteur. Mardi, dans un mail aux salariés, Sibyle Veil a fait valoir que Guillaume Meurice n’avait «pas laissé d’autre choix» à Radio France que de le congédier. «En réitérant finalement ses propos à l’antenne en avril, Guillaume Meurice a ignoré l’avertissement qu’il avait reçu, la mise en garde de l’Arcom et détourné la décision du procureur» de classer la plainte sans suite, a-t-elle argumenté. «Ces arguments ne convainquent pas», a assuré le membre de la rédaction d’Inter, selon qui Mme Van Reeth «assure que la satire politique aura toujours sa place sur l’antenne et qu’elle cherche de nouveaux humoristes». Ancienne directrice emblématique de France Inter (2014-2022), Laurence Bloch a elle estimé que Guillaume Meurice aurait pu «exprimer un regret». «Mon cher, cher Guillaume Meurice, il y avait si peu à faire pour éviter cette mécanique du désastre. Juste considérer tous les auditeurs (…) de la même façon: ceux qui ont ri à votre blague, ceux qui en ont été cruellement blessés», a posté sur X Mme Bloch, qui vient de quitter Radio France après 50 ans de carrière.