Jacques Canetti et Eddie Barclay, 2 immenses dénicheurs de talents, se sont disputés pendant des décennies les plus grands chanteurs français. C’est cette rivalité mythique que raconte un documentaire diffusé jeudi sur France 5. Le discret Jacques Canetti (1909-1997), c’était l’homme qui se cachait derrière Edith Piaf, Charles Trenet, Jacques Brel, Serge Gainsbourg, Georges Brassens ou Jacques Higelin. Le flamboyant Eddie Barclay (1921-2005), de son côté, reste associé à Charles Aznavour, Léo Ferré, Jean Ferrat, Dalida ou Eddy Mitchell. Ces deux «meilleurs ennemis» incarnent une époque dorée de la chanson française, une chanson qui naissait dans les clubs parisiens et grandissait sur microsillons. Le documentaire réalisé par Joëlle Miau, diffusé sur France 5 jeudi à 21h35 dans le cadre de la série «Duels», revient avec la voix de François Morel sur les parcours croisés de deux hommes aux tempéraments très différents. «Canetti cherchait plus l’écriture, cherchait plus le sens. Je ne dis pas que Barclay n’a pas trouvé des artistes qui avaient du fond mais ça ne le gênait pas d’avoir aussi la forme», résume le PDG d’Universal France, Pascal Nègre dans ce film. Canetti, grand amateur de jazz issu d’une famille de commerçants bulgares, invente dans les années 1930 le premier radio-crochet sur Radio-Cité,
où il découvre notamment une «môme» gouailleuse, Edith Piaf, puis un certain Charles Trenet. Après la guerre, il fonde le théâtre des Trois Baudets qui devient peu à peu une «couveuse» pour nouveaux talents. Quand il déniche de nouvelles voix, il les produit dans la foulée chez Philips. Jacques Canetti est le frère d’Elias Canetti, prix Nobel de littérature. Barclay, né Edouard Ruault et également fou de jazz, aime beaucoup plus les lumières du show business et de la fête. C’est après la guerre qu’il a «américanise» son nom en Eddie Barclay et s’impose comme «l’empereur du microsillon», après avoir été le 1er à importer les disques vinyles des Etats-Unis. Pendant plusieurs décennies, à partir des années 1950, leurs chemins se croisent souvent et les deux hommes vont se livrer à une course aux artistes, course effrénée et réjouissante que raconte le documentaire avec des images d’archives permettant de revoir les débuts d’un Serge Gainsbourg, d’un Claude Nougaro, d’un Johnny Hallyday ou d’un Eddy Mitchell.