L’audience mensuelle moyenne de TF1 est passée pour la première fois sous le seuil symbolique des 30% en novembre, mais les grands groupes audiovisuels fourbissent leur stratégie depuis deux ans pour répondre à l’exode inéluctable de leurs téléspectateurs, soulignent les analystes. L’érosion de l’audience des chaînes historiques (TF1, France 2, France 3, M6, Arte et Canal+: ndlr) est «inéluctable», estime Florence Le Borgne, analyste à l’Idate, cabinet de conseil en audiovisuel et télécommunications. «A partir du moment où l’offre télévisée est plus abondante, les téléspectateurs vont forcément répartir leur temps de consommation télévisée différemment». Philippe Bailly, directeur général du cabinet d’étude NPA Conseil, note que la baisse d’audience des chaînes hertziennes s’est accélérée il y a deux ans, avec le lancement (mars 2005) et le succès de la télévision numérique terrestre (TNT) gratuite. Une grande partie des Français disposent à présent non plus de quatre ou cinq chaînes gratuites mais de 18. L’étude mensuelle de Médiamétrie a révélé lundi que la part d’audience moyenne de TF1 était passée en novembre sous les 30% pour la première fois, à 29,3%. La chaîne reste largement leader et les autres grandes chaînes ont elles aussi vu leur audience s’effriter: France 2 est à 17,8% contre 19,5% il y un an, France 3 à 13,7% (contre 14,7%), M6 à 11,6% (contre 12,4%)… Parallèlement, la part des chaînes thématiques sur la TNT, le câble et le satellite progresse. Elles représentaient en novembre 19,7% de l’audience télévisée totale. En 2012, elles pourraient représenter 35% de l’audience totale, selon les prévisions de NPA Conseil. Même si l’âge d’or des grandes chaînes est terminé, les groupes audiovisuels disposent de solides atouts, notent les analystes. Ainsi, les chaînes hertziennes «sont les seules à savoir rassembler de très larges publics et les publicitaires vont continuer à valoriser cela», déclare Philippe Bailly. «Dans un univers très fragmenté, cette capacité à rassembler a encore plus de valeur». Ainsi, TF1 qui a une part d’audience d’environ 30%, capte cependant la moitié du chiffre d’affaires publicitaire télévisé. Nonce Paolini, directeur général du groupe TF1, estimait récemment que cet émiettement de l’audience n’était pas «un handicap» pour sa chaîne, mais «une opportunité». Selon le dirigeant de NPA Conseil, les grandes chaînes vont se concentrer encore plus qu’auparavant sur les programmes de fin de journée, de «l’access prime time» (à partir de 18h00) jusqu’à la deuxième partie de soirée, en mettant à l’antenne «des programmes exclusifs, événementiels, mis en valeur sur les écrans plats haute définition». Et de citer des fictions de prestige, des retransmissions sportives et de grands shows, de divertissement ou d’information. La stratégie des grands groupes audiovisuels consiste également à se positionner sur le secteur des chaînes thématiques, note Florence Le Borgne. Nombre d’entre elles appartiennent entièrement ou en partie à des groupes audiovisuels: TMC et NT1 (via AB Groupe) à TF1, Gulli à France Télévisions (et Lagardère), W9 à M6, i-TELE à Canal+… Autres voies de développement, selon l’analyste de l’IDATE: les développements sur Internet avec la vidéo à la demande, la TV de rattrapage (catch-up TV)… et la télévision mobile personnelle (TMP). «La TMP peut être un appel d’air pour les groupes audiovisuels car elle permettra d’accroître l’audience, le temps de consommation télévisé, et donc de générer un surcroît de chiffre d’affaires publicitaire», selon Florence Le Borgne.