Entretien avec … Pierre-Henri Deleau, délégué général du Fipa

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    La 21ème édition du Festival international de programmes audiovisuels (Fipa) ouvrira bientôt ses portes à Biarritz, du 22 au 27 janvier. Rendez-vous est pris avec Pierre-Henri Deleau, délégué général du Fipa.

    média+ : Quel bilan tirez-vous de l’édition Fipa de 2007 ?

    Pierre-Henri Deleau : Dans l’ensemble les échos ont été très bons. Le problème, et je le regrette, est la frilosité des choix des télévisions françaises vis-à-vis des programmes qui ne sont pas américains. C’est comme si le fait d’être russe, chinois ou polonais constituait un handicap. Même si les productions audiovisuelles sont bonnes, ce besoin de l’audimat compte avant tout. J’ai vu plusieurs responsables de programmes venir au Fipa et me dire «C’est très bien mais ce n’est pas pour nous, le public ne regardera pas».

    média+ : Pourquoi avez-vous décidé de consacrer une journée entière à la télévision suédoise ?

    Pierre-Henri Deleau : Parce qu’il s’agit d’une télévision exemplaire. Nous avons beaucoup hésité avec les chaînes américaines HBO et Channel 4 dont les programmes sont de très bonne qualité. La télévision suédoise est assez impressionnante en termes de qualité et de diversité culturelle. Elle diffuse des films qu’elle achète des quatre coins du monde, faute de moyens pour pouvoir en produire. Mais les films acquis sont aussi bien albanais, turcs ou slovaques. Notre but est que les dirigeants de chaînes suédoises nous expliquent leur fonctionnement car je ne crois pas que le public suédois soit plus ouvert que le public français qui est cinéphile. Pourtant eux ils réussissent à avoir un programme diversifié alors que nous pas vraiment.

    média+ : Que pensez-vous de la suppression de la publicité sur les services publics ?

    Pierre-Henri Deleau : Dans l’idéal, c’est formidable parce qu’il est évident que la publicité entraîne un audimat plus grand pour que la minute vendue soit plus chère. Si on supprime la publicité, les responsables des chaînes publiques pourront oser avoir une politique culturelle beaucoup plus ambitieuse. Sauf que l’ensemble de la publicité sur les chaînes publiques représente 840 millions d’euros et un temps de diffusion de 3h25 par jour. Il faudrait produire 3h25 pour remplacer la publicité, ce qui coûte entre 1 million et 1,2 million d’euros: comment les trouver ? On pourrait augmenter la redevance mais aucun gouvernement ne l’a fait avant et je n’aimerais pas qu’il le fasse. On peut aussi privatiser une chaîne ou répartir la publicité. Mais dans ce dernier cas, il est clair que l’ensemble de ces 3h25 de publicité ne sont pas absorbables par les chaînes privées: elles n’ont pas assez d’argent ou alors elles devront montrer 25 minutes de publicité sur 1 heure.

    média+ : Depuis que le Fipa existe, sentez-vous une évolution de son impact ?

    Pierre-Henri Deleau : Oui, j’ai la sensation que toutes les chaînes, publiques et privées confondues, vont voir les programmes sélectionnés au Fipa. De ce point de vue-là, le Fipa a un prestige évident. Les prix impressionnent puisque je constate, qu’une fois le palmarès rendu public, télévisions, radios, journaux publient les résultats. Sur le plan commercial, les chaînes qui achètent le plus au Fipa sont essentiellement des chaînes thématiques et celles de petits pays qui sont suffisamment riches pour acheter mais pas suffisamment pour produire. C’est le cas de la Suisse, la Belgique, la Hollande, le Canada ou encore le Québec.