Pléthore de candidats, mais un seul vainqueur: à l’image de son script, la sanglante série coréenne «Squid Game» va affronter une compétition féroce lundi aux Emmy Awards, équivalents des Oscars de la télévision américaine, où elle a une chance d’entrer dans l’histoire. Sombre et violente dénonciation des dérives du capitalisme, dans laquelle des misérables s’entretuent lors de jeux d’enfants cruels avec l’espoir de remporter des millions, le succès planétaire de Netflix pourrait devenir la première production en langue non-anglaise à être élue meilleure série dramatique. Un succès qui s’inscrirait dans les pas du film coréen «Parasite», qui avait remporté l’Oscar du meilleur film en 2020. Mais pour l’emporter à Los Angeles, la série devra devancer un sérieux concurrent: «Succession», production déjà récompensée il y a deux ans pour sa chronique d’une puissante famille dont les membres complotent et s’entre-déchirent. «C’est assez difficile de faire face à ce mastodonte de HBO», remarque le chroniqueur cinéma de Deadline Pete Hammond, en rappelant que la série américaine semble mener la danse avec 25 nominations. Ce spécialiste mise toutefois sur un prix de meilleur acteur pour Lee Jung-jae, l’acteur principal de «Squid Game». De quoi faire du Sud-Coréen le premier gagnant de ce prix pour une performance dans une autre langue que l’anglais. Les séries «Severance» (Apple TV+), métaphore inquiétante sur le monde du travail, et «Ozark» (Netflix), qui explore le blanchiment d’argent et les vices de la classe moyenne américaine, visent elles aussi le prix de la meilleure série dramatique. Dans ce genre de séries, Zendaya, déjà récompensée en 2020, a toutes les chances d’être encore élue meilleure actrice pour son rôle d’adolescente toxicomane dans «Euphoria».
«Ted Lasso» tient la corde : Côté comédies, «Ted Lasso» (Apple TV+), vainqueur l’an dernier, semble bien parti pour rempiler. Dans la série, Jason Sudeikis incarne un entraîneur de football américain parachuté dans une équipe de foot anglaise. Nominé dans la catégorie meilleur acteur d’une comédie, il affronte Bill Hader, pour son rôle de tueur à gages qui se rêve en star hollywoodienne dans la série «Barry», qui reprend après un hiatus de trois ans dû à la pandémie. Chez les femmes, Jean Smart est largement pressentie pour être à nouveau élue comme meilleure actrice, pour sa performance dans «Hacks», une comédie où elle campe le rôle d’une humoriste vieillissante de Las Vegas, forcée de se réinventer sur scène. Comme chaque année, la catégorie mini-série, qui récompense les productions limitées à une seule saison, apportera du sang neuf. Quatre des cinq prétendants s’inspirent de scandales réels. «Dopesick» examine la dépendance meurtrière des Etats- Unis aux opioïdes, «The Dropout» aborde la fraude montée par la start-up médicale Theranos, «Pam and Tommy» retrace les dessous de la publication de la sex tape de Pamela Anderson, et «Inventing Anna» suit l’histoire d’une jeune Russe qui a longtemps trompé le gotha new-yorkais en se faisant passer pour une riche héritière allemande. Mais dans cette course très serrée, la satire tragi-comique «The White Lotus», qui tacle l’hypocrisie ambiante d’un hôtel de luxe hawaïen, est donnée favorite par les experts. «Je pense que Michael Keaton est quasiment assuré d’être élu meilleur acteur dans une mini-série», pour son rôle dans «Dopesick», pronostique M. Hammond. Le critique pressent aussi une récompense pour Amanda Seyfried, qui joue la patronne déchue de Theranos dans «The Dropout».