L’Autorité de la Concurrence rend jeudi son verdict sur l’accord Canal+/beIN, qui ferait du groupe français le distributeur exclusif en France de la chaîne sportive qatarie. En cas de feu vert, quel impact pour les chaînes et pour le public ?
Objectif : des offres couplées
Canal+ veut proposer des offres couplées Canal+/beIN séduisantes, avec une économie de 3 ou 4 euros par rapport aux offres séparées (et encore davantage la première année). Exemples: une offre Canal+beIN à 49,9 euros par mois (séparément le coût serait de 39,9 euros pour Canal + 14 euros pour beIN).
Une offre en solo sur beIN serait maintenue à 13-14 euros (Canal+ s’y est engagé), gérée par Canal+, qui touchera la recette après versement d’une commission aux opérateurs de box. Ou bien une offre uniquement sportive, avec les chaines sports de CanalSat (Eurosport, MCS…) + beIN pour une vingtaine d’euros par mois. Pour Canal+ : regagner des abonnés et des recettes
Depuis 3 ans, Canal+ perd des abonnés, perd des droits sportifs et perd de l’argent : concurrencé sur le sport par beIN, et sur le cinéma par les
nouvelles chaînes gratuites et Netflix, Canal+ a perdu de 550.000 abonnés en 5 ans, passant de 4,42 millions en 2012 à 3,88 millions actuellement. Le groupe de Bolloré affirme que la chaîne perd 400 millions cette année,
même si le groupe est globalement bénéficiaire, et a même laissé planer une menace de faillite si l’accord est refusé. Avec l’accord, Canal+ verserait environ 400 millions par an à beIN mais toucherait les abonnement de ses 2,5 millions de clients. Canal+ espère ainsi redevenir rentable et regagner les abonnés perdus, partis sur beIN pour cause de droits du foot.Pour beIN : des recettes garanties, redevenir rentable beIN a gagné 2,5 millions d’abonnés, mais en payant très cher pour rafler les droits sportifs à Canal+: 500 millions d’euros de droits et un déficit annuel de 300 millions environ, selon Maxime Saada, n°2 de Canal. beIn ne communique aucun chiffre mais selon les analystes, son chiffre d’affaires serait 250 millions actuellement. Un tarif annuel garanti versé par Canal+, de 300 à 400 millions sur 5 ans, la ferait redevenir rentable.
Pour l’instant, beIN roi du sport
Sans accord, les fans de sports risquent de continuer à aller vers beIN, qui a raflé la plupart des grandes compétitions de foot, le sport-roi. En foot, Canal+ n’a gardé qu’une partie de la Ligue 1 et la Ligue des Champions, le reste étant détenu par beIN (jusqu’en 2018). Tout le reste a été acheté par beIN (Bundesliga, Serie A, Liga…) sauf la Premier League anglaise, acquise par Altice pour sa chaîne MCS. BeIN Sports et TF1 se partagent la diffusion en France des Coupes du monde de football 2018 et 2022. Et beIN a les droits de l’Euro 2016, revendus en partie à TF1 et M6. Dans les autres sports. Canal a perdu le tennis (beIN a repris Wimbledon, le Masters et les Masters 1000 jusqu’en 2019), et en basket la chaîne qatarie a obtenu la NBA américaine et l’Euroleague. Elle a aussi repris la coupe d’Europe de rugby et toutes les compétitions masculines et féminines de handball. Canal+ a gardé le Top 14 de Rugby jusqu’en 2023 et la NHL (hockey), les tournois de tennis de Monte-Carlo et BNP Paribas Masters et le Four Nations de rugby. Elle a également ravi à TF1 la Ligue des champions (depuis trois ans et jusqu’en 2018) et la Formule 1 (jusqu’en 2016), tout en conservant le golf européen et américain (jusqu’en 2016).