A. LASCH (Snep) : «7 Français sur 10 considèrent que les radios jouent trop souvent les mêmes titres»

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L’essor du streaming par abonnement et le succès des artistes produits en France participent à l’élan retrouvé de la musique enregistrée dans l’Hexagone. Analyse du marché avec Alexandre LASCH, Directeur général du SNEP, Syndicat national de l’édition phonographique.

Le streaming audio est-il le ressort principal de croissance de la musique enregistrée ?

Absolument ! Le streaming par abonnement porte la croissance. Il s’agit du segment le plus rémunérateur de l’industrie musicale et celui qui progresse le plus vite. Autre phénomène, la performance des artistes produits en France. Ce succès s’amplifie d’année en année. 19 des 20 meilleures ventes d’albums sont des productions locales et représentent 80% du Top 200. Dans ce classement, nous sommes fiers de voir émerger 46 jeunes artistes dont la chanteuse Angèle qui est sur le haut du podium.  

Les partenariats producteurs/plateformes sont-ils de plus en plus vertueux ?

Oui, ils le sont depuis plus de 10 ans maintenant. Ces partenariats, que nous avons signés avec des plateformes de streaming audio comme Spotify, Deezer ou Apple Music, produisent des effets considérables sur le marché musical. Ces accords ont permis d’installer un nouveau mode de consommation auprès des utilisateurs et rencontre un succès grandissant. On enregistre 7,2 millions d’abonnements pour 9,4 millions de Français qui écoutent les plateformes de streaming musicales payantes.

Derrières ces accords, la rémunération des artistes est-elle satisfaisante ?

Notre travail consiste à développer les sources de revenus pour les artistes et les producteurs. Mais de là à dire qu’ils sont correctement rémunérés, ce serait faire l’impasse sur la chute vertigineuse du chiffre d’affaires de la production musicale en France. Au cours des 15 années de crise du disque, ce sont 60% de nos revenus qui ont disparu. Malgré les très bons résultats que l’on affiche aujourd’hui, le marché rattrape tout juste celui d’il y a 10 ans et ne représente que 44% de celui de 2002. Il y a encore donc du chemin à parcourir mais nous sommes sur la bonne voie. La progression du chiffre d’affaires du streaming par abonnement est constante et rapide.

Cela signifie aussi que les labels se réinventent ?

Oui, ils ont épousé les opportunités qu’offrent le numérique. Depuis 5 ans, l’industrie crée de nouveaux postes, notamment en matière de curation digitale : partenariats digitaux avec les marques, ventes de playlist avec les plateformes, promotion et marketing digital.

La place de la musique à la télévision évolue-t-elle de manière positive ?

C’est contrasté ! Sur certaines chaînes comme TF1, le nombre de Prime Time reste important mais sont principalement portés par des télé-crochets qui ne soutiennent pas la nouvelle scène au sens des nouveaux artistes produits par les maisons de disques. Quant aux chaînes du groupe M6, elles investissent moins les premières parties de soirées dédiées aux programmes musicaux. Elles ont des obligations dans leur convention, qui ont d’ailleurs été allégées l’année dernière, et qui permettent un minimum d’exposition de nos artistes.

Quels sont les défis à relever pour le SNEP ? L’un des enjeux est de préserver les mécanismes qui permettent la diversité d’artistes et de productions sur les ondes. Les radios souffrent de la baisse de leurs audiences et elles ont tendance à accuser de manière un peu trop rapide le mécanisme de quota. 7 Français sur 10 considèrent que les radios jouent trop souvent les mêmes titres. C’est la raison principale qui est évoquée pour expliquer la migration de la radio vers le streaming.  Dans le projet de loi audiovisuelle, nous sommes attentifs à ce qui se discute.