Sensations: la production audiovisuelle explore de nouveaux outils

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Vidéos à 360 degrés, films à goûter ou à sentir: la production audiovisuelle, mais aussi le journalisme, explorent de nouveaux outils qui font vivre au public des expériences inédites en jouant sur ses sensations. A en croire les professionnels réunis ce week-end à Biarritz, dans le sud-ouest de la France, pour le Festival international de la production audiovisuelle (Fipa), la vidéo à 360 degrés sera le phénomène de 2016. Sur un ordinateur ou un smartphone, elle permet de se balader à 360 degrés dans l’image, en rendant visible le hors-champ. Avec un casque adapté, elle devient réalité virtuelle. Cette année, outre la commercialisation attendue de plusieurs casques de réalité virtuelle (dont l’Oculus Rift de Facebook), la production de contenus devrait accélérer. «Aujourd’hui, les grands studios de production américains sont très intéressés et vraiment impliqués dans cette technologie», constate Philippe Bailly, président du cabinet NPA Conseil.

La chaîne franco-allemande ARTE a lancé début janvier une application dédiée, Arte360, pour permettre aux utilisateurs de smartphones et tablettes de visionner les vidéos qu’elle produit en 360 degrés (concerts et découverte de paysages essentiellement). L’idée est de «permettre au spectateur d’ARTE de se rendre virtuellement sur place et de choisir la perspective qui lui convient», explique la chaîne, qui compte sortir en février «I, Philip», une fiction conçue pour les casques de réalité virtuelle afin d’accompagner un documentaire sur l’auteur de science-fiction Philip K. Dick. «Certains se servent de la réalité virtuelle comme d’un produit dérivé de leur film, comme «Star Wars» par exemple. Mais pour d’autres, comme ARTE, il faut que ce soit une 2ème expérience, une oeuvre en soi», explique Grégoire Parain, dont le studio a participé à la création d’un film de réalité virtuelle «Notes on Blindness», sélectionné au festival américain de cinéma indépendant de Sundance. Côté journalisme, on trouve déjà plusieurs reportages, notamment de guerre, filmés dans ce format. Le quotidien «New York Times», qui a lancé sa propre application 360 degrés, a offert fin 2015 plus d’un million de Google Cardboard (casque de réalité virtuelle en carton) à ses abonnés pour qu’ils puissent visionner ses productions. «La réalité virtuelle, c’est ce qu’il y a de mieux pour raconter les histoires qui nécessitent de l’empathie», estime Christian Bennett, responsable des contenus multimédias du journal britannique «the Guardian». «Cela tient aussi à la façon de regarder ces vidéos, isolé dans son monde, sans autre sollicitation», décrit-il. Si cette technologie est sur le point de devenir grand public, d’autres sont plus expérimentales. Le projet «Famous Deaths», qui était présenté au Fipa, propose au spectateur de revivre les derniers instants de personnes célèbres, en misant sur la narration olfactive. Par exemple une odeur de poudre pour l’assassinat de Kennedy. «L’idée, c’est que le corps puisse participer à la narration. L’odorat est un des 1ers sens de l’Homme, c’est un moyen très fort de manipuler l’audience», explique Frederik Duenrick, l’un des concepteurs du projet. Leur documentaire, qui ne repose que sur du son et des odeurs, est expérimenté dans un caisson fermé où le participant doit s’allonger. «Aujourd’hui, on peut stimuler la vue, l’ouïe et l’équilibre avec la réalité virtuelle. Il y a 3 sens sous-exploité: l’odorat, le toucher et le goût», relève de son côté Ali Israr, ingénieur pour le département recherche de Disney. Il travaille sur le toucher, en utilisant les principes des technologies tactiles des smartphones: en jouant sur les vibrations électriques, il arrive à reproduire différentes textures, métal, cuir, sable mais aussi des reliefs.