Bruno Dumont se lance dans le tragi-comique avec la série «P’tit Quinquin»

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lus de quinze ans après «La Vie de Jésus», le réalisateur Bruno Dumont, auquel rend hommage le festival du film de La Rochelle qui s’ouvre vendredi, se lance dans le tragi-comique avec la série «P’tit Quinquin», sur Arte à la rentrée, avec l’impression d’avoir trouvé «un équilibre». 

Projetée en avant-première mercredi prochain à la Rochelle, et déjà présentée à la Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes, où elle a été accueillie avec enthousiasme, «P’tit Quinquin» – nom d’un personnage de la série et titre d’une célèbre berceuse en ch’ti – est une comédie policière déjantée en 4 épisodes autour d’une suite inexpliquée de meurtres commis aux abords d’un village côtier du Boulonnais. La série met en scène un duo policier inefficace du plus grand effet comique – un commandant de gendarmerie ch’ti bourré de tics et son adjoint philosophe peu énergique -, au milieu d’une galerie d’autres personnages bizarres ou hauts en couleur et d’une bande d’enfants dominée par P’tit Quinquin, petit blond au visage asymétrique, bec de lièvre et appareil auditif. Evoquant à la fois le burlesque des films de Jacques Tati ou Buster Keaton, l’étrangeté de «Twin Peaks» ou l’atmosphère poisseuse d’une série comme l’américaine «True Detective», «P’tit Quinquin» oscille entre enquête en apparence ancrée dans le réel et loufoquerie. «Le comique, c’est vraiment une évolution naturelle dans mon travail après avoir beaucoup exploré le drame», a expliqué le réalisateur de 56 ans, auteur de six longs métrages depuis «La Vie de Jésus» en 1997, et récompensé par le grand prix du jury au Festival de Cannes en 1999 pour «L’Humanité» et en 2006 pour «Flandres». «J’avais envie depuis très longtemps de faire une comédie. J’ai écrit «P’tit Quinquin» avec l’envie peut-être d’aller sur cette terre là, et idéalement de me parodier moi-même», poursuit-il. «Aujourd’hui, j’ai peut-être assez d’ironie sur moi-même pour passer par le rire, plutôt que de paraître très sérieux». 

Pour cet ancien professeur de philosophie, connu pour ses films aux sujets âpres et au style choc et épuré, qui avait signé en 2013 «Camille Claudel 1915», «il y a en nous à la fois du très sérieux et du pas sérieux, et quand on fait coexister les 2, j’ai l’impression d’une plénitude». Pour sa 1ère série, genre par lequel il se dit «souvent un peu accroché mais déçu», le réalisateur, à qui Arte a laissé carte blanche, explique qu’il a «écrit tout seul, donc il y a sûrement quelque chose de plus tordu, mais de plus artisanal» que dans les séries «écrites à 40». «La série me permettait d’avoir beaucoup de personnages» et de «faire des digressions» autour du «rail» de «l’intrigue policière», poursuit l’auteur nordiste, qui a choisi une nouvelle fois d’ancrer son histoire dans le Nord-Pas-de-Calais et de prendre des acteurs non professionnels de la région. «Très content» de cette expérience, il n’exclut pas une saison 2 de «P’tit Quinquin» et dit aussi «avoir un projet de comédie au cinéma». «Je quitte de plus en plus le naturalisme», lance-t-il. «Il y a encore plein de genres que je peux encore explorer. Je ferais bien une comédie musicale. Je me dis que je suis à deux doigts de faire chanter mes personnages !».