L’intelligence artificielle, grande gagnante du Nobel 2024

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De l’apprentissage automatique à la prédiction de protéines, l’intelligence artificielle (IA), au coeur des travaux des lauréats du prix Nobel de physique et de chimie, est la grande gagnante de cette moisson 2024. Le Britanno-Canadien Geoffrey Hinton et l’Américain John Hopfield ont ouvert le bal mardi en obtenant le prix Nobel de physique pour leurs travaux respectifs dans l’apprentissage automatique, utilisé dans le développement de l’intelligence artificielle. Grâce à leurs travaux, l’humanité a maintenant un nouvel instrument dans sa boîte à outils, «que nous pouvons choisir d’utiliser à de bonnes fins», a souligné le jury. M. Hinton, 76 ans, professeur à l’université de Toronto au Canada, est considéré comme l’un des pères fondateurs de l’IA, mais aussi une voix sonnant l’alarme sur cette révolution technologique. Le triomphe de l’intelligence artificielle ne s’est pas arrêté là. Mercredi, le prix Nobel de chimie a été décerné à l’Américain David Baker et à un tandem formé du Britannique Demis Hassabis et de l’Américain John Jumper, qui ont mis au point en 2020 un modèle d’IA dénommé AlphaFold2 pour déterminer la structure des protéines. Le duo, qui dirige Google DeepMind, filiale de Google spécialisée dans l’IA, était cité parmi les favoris et avait déjà reçu le prestigieux prix Lasker pour la recherche médicale fondamentale en 2023. «L’impact de Rosetta, AlphaFold et les travaux basés sur l’apprentissage automatique pour la conception et la prédiction de structures de protéines est déjà immense et promet d’avoir des effets toujours plus importants dans le futur», a salué sur X le Français Yann LeCun, directeur du laboratoire sur l’intelligence artificielle de Meta. C’est la première fois qu’un institut issu des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) remporte un Nobel, si l’on se réfère aux affiliations renseignées par le comité. De quoi cimenter le statut de l’intelligence artificielle, longtemps méconnue du grand public, comme technologie de rupture majeure. Décernés depuis 1901, les prix Nobel distinguent les personnes qui ont oeuvré pour «le bienfait de l’humanité», conformément au voeu de leur créateur, l’inventeur suédois Alfred Nobel. «Le rôle de l’intelligence artificielle dans la manière dont nous faisons de la science ne peut pas être sous-estimée», souligne Elena Simperl, professeure d’informatique au King’s College de Londres. «Les Nobel ont reconnu cela, tout en soulignant aussi le rôle joué par les méthodes interdisciplinaires dans l’informatique de pointe». Si le grand public a découvert l’intelligence artificielle il y a à peine deux ans avec le lancement de ChatGPT, «chatbot» d’IA générative capable de produire textes, images et autres contenus sur simple requête en langage courant, l’IA est présente depuis près de 70 ans dans le domaine scientifique. Le mathématicien anglais Alan Turing, considéré comme l’un des pères de l’informatique moderne, propose au milieu du XXe siècle de tester l’intelligence d’une machine en la faisant converser par écrit avec un être humain. C’est la naissance de l’intelligence artificielle. Cette technologie bâtie sur l’exploitation à très grande échelle des données («big data») par des algorithmes a continué à se développer dans les années 1980. La discipline connaît ensuite un relatif désintérêt jusqu’aux années 2010, où elle bénéficie d’un regain de popularité grâce à l’amélioration des capacités des ordinateurs. L’essor de l’IA constitue pour certains, comme le patron d’Alphabet (Google) Sundar Pichai, un bouleversement pour l’humanité «plus profond que le feu et l’électricité». En témoignent les investissements massifs des géants de la tech dans ce domaine. Ils devraient ainsi atteindre 1.000 milliards de dollars au cours des trois prochaines années, selon le cabinet Wedbush.