Décès de Guy Marchand, le Nestor Burma du petit écran

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Guy Marchand, le Nestor Burma du petit écran, décédé vendredi à l’âge de 86 ans, était un touche-à-tout dilettante mais Césarisé, qui aimait jouer au crooner démodé. «Burma, c’est moi!», confessait à 79 ans celui qui, gouailleur et cynique, a incarné le détective privé de Léo Mallet dans la série télévisée éponyme entre 1991 et 2003.

«Avec ce personnage, j’étais comme un poisson dans l’eau!», racontait en 2016 sur France Culture cet enfant de la guerre né en 1937, «gentil voyou» de l’est parisien au physique «désespérément rétro». «En même temps, j’ai tout réinventé. Je ne pouvais pas me passer de poésie et j’ai fait de Burma quelqu’un qui aime le sexe et la poésie!». «Micmac moche au Boul’Mich’», «Panique à Saint Patrick», «Mignonne, allons voir si la chose»: au gré des 42 épisodes dans lesquels il tourne, c’est lui qui donne au privé cette étoffe des héros de série B, entre lustre hollywoodien et «divagation surréaliste» d’un San Antonio.

Avec sa cravate dénouée et son air faussement flegmatique, il défend des jeunes femmes, débusque la canaille à coup de calembours et joue du sax’ dans les bois, l’imperméable ouvert et le borsalino enfoncé sur son crâne chauve… «Moi, j’ai toujours été démodé… Je rêve en noir et blanc et j’ai tout fait pour qu’on perçoive Burma en noir et blanc!» Avant de devenir Burma, l’acteur, qui prétendait être «entré par effraction dans la profession», s’est distingué au cinéma avec de grands réalisateurs. On le voit chez François Truffaut («Une belle fille comme moi», 1972), Maurice Pialat («Loulou», 1980), Bertrand Tavernier («Coup de torchon», 1981) ou encore Christophe Honoré («Dans Paris», 2006). En 1982, il gagne le César du meilleur second rôle dans «Garde à vue» de Claude Miller. Avec Lino Ventura, il se paye Michel Serrault dans la peau d’un flic impulsif. «Ca m’a donné un peu d’autorité dans le métier car on ne me prenait pas au sérieux comme chanteur de variété!». Car c’est par la chanson que ce fils d’un ferrailleur et d’une «gitane» acquiert d’abord une petite notoriété. Il grandit avec «les manouches» et les musiciens – Django Reinhardt, Stéphane Grappelli – qui venaient répéter dans le garage familial. Son père, régisseur à Bobino la nuit, le met à la boxe et à la clarinette. Avec ses airs de séducteur latino et sa voix de baryton, il écrit «La Passionata» en cinq minutes, en rentrant de la guerre d’Algérie. Cette «plaisanterie» devient l’un des tubes de l’été 65. Il signe d’autres succès comme «Tango, Tango» en 1975 avec le bandonéoniste argentin Astor Piazzola. «Je suis une vedette populaire, pas une star», aimait-il répéter. Avec «Destinée», la bande-originale des «Sous-doués en vacances» (1982), il récolte sa «plus grande honte». «C’était une blague, une connerie pour l’été, et on en a vendu 250.000 exemplaires! J’étais vexé!», racontait-il à propos de ce titre repris notamment dans la version ciné du «Père Noël est une ordure». Car la «vraie nature» de Guy Marchand, «c’est d’être chanteur». Fin connaisseur de jazz et de musiques latines, il signe une quinzaine d’albums («Nostalgitan», «A Guy in blue», «Emilio») au succès confidentiel mais avec des musiciens de renom. «Je ne suis qu’un chanteur», disait-il en 2015 sur France 5. «Quand je vais mourir, il ne restera pas grand-chose, peut-être un fond sonore, comme de la musique d’ascenseur». Divorcé et père de deux enfants, il s’était remarié à 70 ans avec une femme de 40 ans sa cadette.