B. VILLEGAS (The Wit) : «Les jeux TV de stratégie ou de psychologie sont en vogue»

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Chaque année, la création télévisuelle mondiale regorge de surprises et de tendances. Spécialisée dans la veille internationale de contenus, la société The Wit déniche les nouveaux concepts et futurs programmes de flux. Rencontre avec Bertrand VILLEGAS, co-fondateur de The Wit.

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Quels critères utilisez-vous pour identifier les nouveaux formats TV les plus prometteurs à travers le monde ?

BERTRAND VILLEGAS

Avec nos équipes, nous effectuons une recherche exhaustive de tous les formats mondiaux. On identifie ensuite les shows qui apportent quelque chose de plus créativement, et qui s’insèrent dans une tendance globale. Sur cette base, on catégorise les programmes qui ont potentiellement un avenir et qui s’appuient sur une tendance identifiée en amont chez certains diffuseurs.

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Quelles tendances actuelles observez-vous dans la création télévisuelle mondiale ?

BERTRAND VILLEGAS

On a identifié plusieurs familles de formats développés sur la base de succès existants. Le concept ayant le plus rapidement émergé, c’est celui que l’on a vu en France l’été dernier sur M6 avec «Les Traîtres». Il s’agit de l’émission ayant été la plus adaptée les deux dernières années dans le monde. Ce succès a généré une grande créativité autour de «jeux de stratégie et de psychologie» sur la base d’aventures, de défis et d’enquêtes. En ce sens, TF1 a acquis il y a plusieurs mois «The Unknown» où des candidats doivent choisir entre des épreuves connues et inconnues. Les épreuves inconnues sont évidemment mieux récompensées. Le format belge, «Destination X», a été optionné dans de nombreux pays (Royaume-Uni, Etats-Unis…) et sera bientôt adapté en France sur M6 par ITV Studios France. Pendant plusieurs semaines, des candidats vont parcourir l’Europe à l’aveugle à bord d’un bus géant aux vitres opaques sans aucune possibilité de se repérer dans l’espace. Dans ce jeu mystère, ils doivent deviner l’endroit où ils se trouvent.

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Autre tendance à observer ?

BERTRAND VILLEGAS

Le dating en maillot de bain reste une tendance lourde. Chaînes et plateformes s’en emparent, pensant toucher un public plus jeune. Ce genre est aujourd’hui essentiellement consommé en non linéaire. Dans ce domaine, «Stranded on Honeymoon Island» (Échoués sur l’île de la Lune de Miel) est un mélange entre «Koh Lanta» et «Mariés au premier regard» puisque des candidats que l’on marie débarquent ensuite sur un île déserte pour y survivre. En France, Ah ! Production développe «Divide» où une maison est justement divisée par une vitre sans tain avec de part et d’autre des couples (séparés ou non) observant si leur conjoints ou ex peuvent être tentés par des relations.

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Quel nouveau divertissement tire son épingle du jeu ?

BERTRAND VILLEGAS

Le format dont les gens parlent le plus s’appelle «The Piano». Dans la version anglaise sur Channel 4, ce télécrochet élit les meilleurs pianistes amateurs, à partir de performances réalisées sur des pianos publics dans les plus grandes gares britanniques. Pour évaluer les candidats, deux jurés : le pianiste chinois Lang Lang et le chanteur pop Mika.

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Comment la montée des plateformes de streaming a-t-elle influencé la création et la distribution de nouveaux formats à travers le monde ?

BERTRAND VILLEGAS

D’un point de vue créatif, les plateformes ont tendance à refaire un peu ce que fait la télévision classique depuis 20 ans. Il y a beaucoup de formats qui se distribuent aujourd’hui dans plusieurs pays mais sur la même plateforme. «Les apprentis aventuriers» (Banijay) de W9 s’est exportée dans quatre pays étrangers (Finlande, Suède, Danemark et Norvège) dans des versions diffusées sur Amazon Prime Video. «LOL : qui rit sort !» (Endemol France) est l’une des émissions les plus adaptées dans le monde car Prime Video la décline dans tous les pays.

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Quelles sont les principales différences entre les stratégies de contenu adoptées par les chaînes traditionnelles et les plateformes ?

BERTRAND VILLEGAS

Les plateformes ont rapidement investi le dating qui se consomme comme un feuilleton mais aussi l’aventure comme avec «The Mole» sur Netflix (La Taupe). Elles laissent pour l’instant aux chaînes linéaires les gros événements en direct et les concours de chants événementiels. Mais ça pourrait changer : en Espagne «Star Academy» va revenir sur Amazon.

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Sur le flux, comment les chaînes s’adaptent-elles pour rester compétitives face à la popularité croissante des plateformes de streaming ?

BERTRAND VILLEGAS

Les distributeurs préfèrent vendre à dix chaînes linéaires dans le monde avec des possibilités de renouvellement, plutôt que de se laisser contraindre pour des questions de droits sur les plateformes. Ce que recherchent les chaînes traditionnelles, c’est de conserver leur audience tout en limitant le vieillissement de son public. Quant aux plateformes de streaming, elles ne sont pas entrées dans le cœur du divertissement. Elles ne font ni quiz, ni jeux de plateau.

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Quels défis les producteurs doivent-ils relever pour concevoir des formats adaptés aux attentes des diffuseurs ?

BERTRAND VILLEGAS

La stratégie des producteurs et des distributeurs est de relancer leurs marques existantes. Les diffuseurs s’accordent sur l’idée de miser sur des marques connues, ancrées dans la mémoire collective. S’il y a un format qui cartonne dans le monde, les producteurs auront 4 à 5 ans pour travailler le même univers. Ces dernières années, on assiste tout de même à une exploitation des mêmes idées qui sont rhabillées de saison en saison.

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Comment les formats TV locaux peuvent-ils rivaliser avec les productions internationales ?

BERTRAND VILLEGAS

Dans chaque pays, il y a des spécificités locales. Les formats locaux survivent uniquement s’ils ont été lancés il y a longtemps. En Italie par exemple, le plus grand concours de talent depuis 20 ans ne s’est exporté nulle part, et pourtant c’est un succès dans son pays d’origine.