«Ce n’est pas juste un show, c’est politique»: après le succès inattendu de leur concours télévisé, la tournée endiablée des dix drag queens de l’émission «Drag Race France» fait un carton auprès du public, avec au-delà du seul cabaret, un enjeu fort sur les questions d’identité. «On savait que l’émission allait marcher dans notre communauté mais le spectacle est en train de changer la vie de tellement de gens qu’on est en train de changer la France», s’emballe Hugo Bardin alias Paloma, drag queen lauréate du télé-crochet lancé cet été par France Télévisions, en franchise d’une émission américaine. De Paris à Marseille, en passant par Bruxelles, plus de 15.000 spectateurs ont assisté depuis la rentrée au «Légendaire cabaret club», un spectacle conçu en déclinaison de l’émission «Drag Race France». Une 1ère pour le grand public, les shows étant jusqu’ici plutôt underground. Face à l’enthousiasme du public, plusieurs dates ont été ajoutées à la tournée débutée en septembre et programmée jusqu’à février 2023. Ils étaient 1.800 à Lyon ce week-end, de tous âges, genres et sexualité pour cette représentation de 03h40: sur scène, les artistes portant faux-cils, maquillage excentrique, bas résille et tenues à paillettes dansent, chantent et interprètent des titres iconiques de la culture queer. La fan base (l’ensemble des amateurs, ndlr) est solide, mais d’autres s’initient pour la 1ère fois aux nuances de la culture LGBTQ+, pour lesbienne, gay, bisexuel, transgenre, intersexe et autres. «Pour moi, ça a été une belle claque», lâche, ébahi, Pierre Guichard, 27 ans. «Traîné» par sa copine, il a été «impressionné» par «les performances» des dix reines et «bousculé» par leurs prises de paroles, entre témoignage et discours militant. «Je suis admirative de leur courage et de la force de leurs messages», admet Chantal Billon, 64 ans, venue sur invitation de sa fille. «Le tout avec beaucoup d’humour», ajoute la retraitée qui dit avoir «appris des choses ce soir». Pensée dès 2017 d’après l’émission américaine «RuPaul’s Drag Race», la franchise «Drag Race France» a galvanisé l’audience hexagonale. «C’est génial qu’aujourd’hui des ados, des jeunes ou même des moins jeunes regardent l’émission ou le spectacle et se sentent représentés, notamment sur des questions de genre, encore taboues», témoigne Paloma, coiffée de sa perruque rouge fétiche, clin d’oeil à son idole Mylène Farmer. Pour Nicky Doll, animatrice de la tournée et jury de l’émission «Drag Race France», «le spectacle permet de rappeler qu’on a tous et toutes une part de responsabilité dans ce qui se passe dans la société et qu’on ne peut pas juste dire «j’ai passé un bon moment» et retourner à notre vie commune». «Il faut supprimer les carcans que la société nous a imposés en s’informant sur ces sujets d’identité», appelle, perchée sur ses talons, cette drag queen de 31 ans qui a représenté la France à «RuPaul’s Drag Race» saison 12 en 2020. Pour Raphaël Cioffi, auteur et coproducteur de l’émission télévisée et metteur en scène du spectacle, le show «est une célébration positive de ce qu’on est»: «ça fait du bien» car «d’habitude, à la télé, quand on parle de nous, c’est pour parler à notre place de nos revendications ou alors dire qu’on est malade». «Aujourd’hui, on donne de la fierté et des éléments de langage à des gens qui sont parfois isolés ou qui ne savent peut-être pas ce qui se passe en eux. On veut les rendre fiers et forts de ce qu’ils sont», souligne l’auteur de 39 ans, déjà plongé dans l’élaboration de la saison 2 de «Drag Race France».
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