L. MOREAU (Scam) : «Le documentaire et le reportage ont un rôle jouer d’un point de vue sociétal et politique»

644

La Scam fête son 40ème anniversaire.  Mai 1981, 24 auteurs et autrices, membres du comité de la Société des gens de lettres, créaient la Société civile des auteurs multimédia. Comment se porte la structure en 2021 ? Rencontre avec Laëtitia MOREAU, Présidente de la Scam.

Quelle est la santé de la Scam qui réunit aujourd’hui près de 49.000 auteurs ?

Ce qui est formidable, c’est qu’en 40 ans le genre documentaire et le reportage que nous portons à la Scam, génèrent un véritable appétit. Année après année, les festivals se multiplient et le nombre d’auteurs et d’autrices augmentent considérablement. Il y a aussi une appétence pour l’information de qualité. Nous l’avons observé avec le changement d’écosystème au niveau des médias en ligne. Ils ont totalement révolutionné notre approche de l’information. La Scam défend aussi les YouTubeurs qui produisent aujourd’hui du contenu beaucoup plus élaboré.     

Que représentent les droits d’auteur perçus chaque année ?

Sur la base de 49.000 auteurs issus de différents répertoires – documentaire audiovisuel et sonore, journalisme, web vidéo, littérature, traduction, photographie, illustration, bande dessinée – la Scam collecte près de 110 M€. Les sommes sont ensuite réparties aux ayant-droit. C’est un chiffre qui a progressé ces dernières années, notamment grâce à deux nouveaux accords avec Netflix et YouTube. Je salue le travail des équipes juridiques et de négociations de la Scam qui font un travail remarquable avec les partenaires étrangers. Nous avons réussi à leur faire comprendre qu’il est dans notre intérêt commun d’avoir un écosystème bien financé à la fois du côté des auteurs, des producteurs et même des diffuseurs, pour que la création soit vivante. La Scam est d’ailleurs la seule société d’auteurs au monde à représenter uniquement les auteurs du «réel».

Depuis son origine, la Scam a été de tous les combats pour répondre aux intérêts des auteurs. Quels sont vos combats aujourd’hui ?  

Négocier des droits d’auteur avec des plateformes et de nouveaux médias est un véritable enjeu. Ce n’était absolument pas gagné d’avance. Nous avons inscrit cette tradition du droit d’auteur à la française dans un univers où les cartes ont été totalement rebattues. Les acteurs étrangers ont une tout autre culture que la nôtre. Leur faire comprendre notre a été très positif du point de vue de la protection des auteurs et du financement de la création.

En parallèle, la Scam développe une action culturelle ambitieuse. De nouveaux défis ?

Nous avons une action culturelle forte puisque 70% de ce que nous touchons est reversé en aides directes aux auteurs et aux autrices. C’est au cœur de nos préoccupations. Sur le reste, il y a de l’aide aux festivals et de l’action professionnelle (comme la formation). Nous avons une vraie politique en direction des auteurs. Il n’y a pas de déperdition.

Un mot pour conclure ? Les genres du «réel» comme le documentaire et le reportage ont un rôle jouer d’un point de vue sociétal et politique. Dans une époque où l’on voit la prolifération de fake news et une montée des extrêmes, il est capital d’avoir une information et une création documentaire de qualité, permettant de voir le réel tel qu’il est. Cela permet de contrecarrer des discours mensongers, de propagande ou de manipulation. Nous avons vraiment un rôle important à jouer. Il faut qu’il y ait une prise de conscience par rapport à la place qu’ont les auteurs et autrices dans la vie culturelle et politique de notre pays.