Les personnes qui apparaissent à la télévision sont plus riches, plus urbaines, plus blanches et plus masculines que la population française, et ne sont quasiment jamais en situation de handicap, pointe le baromètre annuel du Conseil supérieur de l’audiovisuel publié mardi. «Il n’est pas acceptable qu’une partie de la population française soit invisible sur nos antennes. La représentation de cette diversité n’est pas une oeuvre de charité, c’est un devoir moral, politique et social», a tancé Carole Bienaimé-Besse, conseillère du CSA en charge des questions de diversité. Comme chaque année depuis 2009, le CSA a analysé les programmes (tous genres confondus) d’une vingtaine de chaînes (TNT gratuite et Canal+) pendant 2 semaines, en mars et en septembre, en se penchant sur les 37.800 personnes apparues au cours des 1.450 heures étudiées. La part des personnes «perçues comme non blanches» a reculé à 15% en 2019, contre 17% en 2018 et 16% en 2016. La proportion de femmes a stagné à 39% alors que ces dernières représentent 52% de la population française, tout comme celle des personnes en situation de handicap, qui plafonne à 0,7% alors qu’elles sont selon le CSA environ 20% de la population. «Cette diminution est un mauvais signal et j’espère qu’elle appellera à un sursaut. Les médias ne représentent pas la réalité du monde tel qu’il est aujourd’hui et montrent un visage médiatique qui confine un peu à l’entre-soi», a regretté Élisabeth Moreno, ministre déléguée chargée de l’Égalité femmes-hommes. «Certains résultats sont décevants, tout simplement inacceptables en 2020», a abondé Roch-Olivier Maistre, président du CSA, appelant les chaînes à une «remobilisation collective» et annonçant que le CSA allait engager un nouveau cycle d’auditions sur le sujet. Pourtant, «quand on parle handicap, ça fait de l’audience», a souligné la secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées, Sophie Cluzel, citant les exemples de la série Vestiaires de France 2 ou du téléfilm «Apprendre à t’aimer» sur M6. La télévision pèche également dans la représentation des territoires, avec seulement 0,4% de personnes issues des territoires d’Outremer (hors France Ô) alors qu’elles sont 3,26% de la population. Autre décalage: les chaînes surreprésentent les catégories socioprofessionnelles supérieures (CSP+, 73% des personnes à l’antenne contre 28% en réalité). Les habitants de banlieue sont toujours aussi peu représentés à l’antenne (7% pour 27% de la population) mais leur représentation «est moins stéréotypée et plus diverse» qu’en 2018, indique le baromètre. Autre progrès, la part des personnes perçues comme «non blanches» dans des rôles positifs est en hausse, à 21% en 2019 contre 18% en 2018. Enfin, la télévision ne représente pas suffisamment les plus jeunes et les plus âgés, selon le baromètre. Les plus jeunes (moins de 20 ans) qui comptent pour près d’un quart de la population ne représentent que 11% des personnes à la télévision tandis que les personnes les plus âgées (65 ans et plus) ne sont présentes qu’à hauteur de 6% sur les écrans alors qu’elles pèsent près de 21% de la population. Saluant des «signes encourageants», la ministre de la Culture Roselyne Bachelot a appelé les chaînes à «agir sans plus attendre pour parvenir à des résultats plus concrets, plus substantiels» en s’appuyant notamment sur les créateurs de «tous horizons». Du côté des chaînes, la patronne de France Télévisions a rappelé son objectif de 30% de réalisatrices et son pacte pour l’Outremer visant à mieux prendre en compte cette population avec la fin de France Ô. Le patron de TF1 mise sur sa nouvelle série quotidienne située dans une école et donc avec beaucoup de jeunes. Les chaînes ont toutefois souligné que le problème venait aussi de la société, avec un manque d’expertes en santé pour le Covid ou de journalistes issus de la diversité pour l’information.
Accueil TV Télévision - Etudes En matière de diversité, la télévision encore très éloignée des réalités