Publicis va acquérir Epsilon, spécialiste américain du marketing ciblé

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Publicis va acquérir Epsilon, un spécialiste américain du marketing ciblé, pour 4,4 milliards de dollars, afin de se renforcer considérablement dans les données, un marché devenu crucial en publicité, à l’heure de la concurrence accrue des géants du web. Le géant publicitaire français a annoncé dimanche avoir conclu un accord avec le groupe américain Alliance Data Systems (ADS) pour racheter sa filiale pour 4,4 milliards de dollars, payables en numéraire, soit un montant de 3,95 milliards net d’impôts. La transaction a été approuvée à l’unanimité par son directoire et son conseil de surveillance, précise un communiqué. «C’est une acquisition structurante, qui nous permet d’accélérer la mise en oeuvre de notre stratégie autour des données, de la création dynamique et de la transformation des entreprises», a déclaré Arthur Sadoun, le président du directoire de Publicis. «Les consommateurs ont changé de comportement», analyse-t-il. «Aujourd’hui une personne a en moyenne 900 interactions numériques avant d’acheter une voiture, ça peut être avec le site du concessionnaire, un comparateur de prix, etc». La société américaine de technologies et de plateformes Epsilon dispose d’un «volume de données inégalé», selon Arthur Sadoun, dans trois catégories: «l’identité des consommateurs – ce que fait Facebook -, leur comportement – ce que fait Google -, mais aussi le transactionnel – ce que fait Amazon».Partant de ce constat, l’enjeu pour les entreprises du secteur publicitaire devient d’associer la finesse des offres, c’est-à-dire le ciblage personnalisé des consommateurs, à des volumes considérables de données. «La capacité à récolter et organiser les données, à créer des profils individuels et à les activer grâce à l’intelligence artificielle pour pouvoir délivrer des messages personnalisés à grande échelle, va faire la différence entre des entreprises qui vont continuer à avoir des croissances profitables et les autres», assure-t-il. L’an dernier Epsilon a «généré 1,9 milliard de dollars de revenus nets, dont 97% aux Etats-Unis», précise Publicis. Il emploie quelque 9.000 salariés, dont 3.700 scientifiques spécialistes de la donnée («data scientists») et 2.000 ingénieurs basés à Bangalore. Dans la foulée, Publicis a réitéré dimanche ses objectifs pour 2019, hors Epsilon dont l’acquisition devrait être finalisée au 3ème trimestre. Et le groupe a annoncé un revenu net en hausse de 1,7% à 2,12 milliards d’euros au 1er trimestre, une bonne performance en Europe ayant contrebalancé le repli de la publicité traditionnelle en Amérique du nord. A périmètre et taux de change constant, le revenu recule de 1,8%. Il ne dit rien en revanche de l’objectif d’afficher une croissance organique de 4% en 2020, que certains analystes jugeaient intenable, lors de la présentation des résultats annuels en février. En 2018 le géant français de la pub a pâti des difficultés de la publicité traditionnelle aux Etats-Unis, un marché encore clef dans son activité. Son c.a. a reculé de 3,9% (+0,1% en organique) à près de 9 milliards d’euros. L’acquisition d’Epsilon doit offrir «dès 2020» une progression «à deux chiffres» du bénéfice net par action ainsi que du flux de trésorerie disponible (free cash flow) par action. Elle sera financée en dette et avec «une partie de la trésorerie disponible». Publicis table sur «un désendettement complet» quatre ans après la clôture de la transaction, conclue à «des termes attractifs». C’est toutefois «un investissement très conséquent pour une entreprise de notre taille», admet M. Sadoun qui réalise sa première acquisition d’ampleur depuis son arrivée à la tête du groupe en juin 2017. Il s’estime néanmoins confiant sur la réussite de l’intégration de la société américaine de traitement des données : il ne s’agit pas d’un nouveau métier et le groupe français a «tiré les leçons» de l’acquisition de la société technologique américaine Sapient en 2014, dit-il.