Olivier Schrameck (CSA) : « Je le redis, la refondation de la régulation audiovisuelle est une impérieuse nécessité »

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Olivier SCHRAMECK, Président du CSA

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel publie 20 propositions dans le sens d’une révision globale de la régulation audiovisuelle pour l’adapter à l’environnement numérique. L’occasion pour media+ de rencontrer Olivier SCHRAMECK, Président du CSA, et ainsi revenir sur ces principales dispositions.

MEDIA +

Pourquoi vouloir adapter la régulation audiovisuelle au numérique ?

OLIVIER SCHRAMECK

Parce que les contenus audiovisuels irriguent le numérique. Pourquoi, face à une telle situation, devrait-il demeurer une asymétrie de régulation, avec d’un côté des médias classiques ultra-régulés et, de l’autre, un univers numérique livré à lui-même ? Je le redis, la refondation de la régulation audiovisuelle est une impérieuse nécessité. Nos propositions ont été exposées, au législateur de s’emparer de la réforme.

MEDIA +

Vous préconisez de nouvelles obligations pour les réseaux sociaux. Pourquoi et quelles sont-elles ?

OLIVIER SCHRAMECK

Parce que la directive SMA prend en compte ces nouveaux acteurs qui sont une porte d’entrée («gatekeeper») vers du contenu audiovisuel. Il est indispensable que celui-ci ne porte pas atteinte au développement moral, mental et physique des mineurs, ni incite à la haine ou à la violence envers qui que ce soit.

MEDIA +

Vous proposez que les mécanismes de contrôle parental soient généralisés et standardisés sur les nouvelles plates-formes. Pouvez-vous nous en parler ?

OLIVIER SCHRAMECK

Le Conseil constate que les outils de contrôle parental sont parfois insuffisants, facilement contournables -ou à l’inverse trop complexes- et qu’ils varient largement d’une plateforme à l’autre et d’un équipement à l’autre (téléviseur, ordinateur, tablette, smartphone). Les parents devraient pouvoir mettre en œuvre plus facilement ce contrôle et si possible le paramétrer une fois pour toutes.

MEDIA +

Le CSA préconise d’ajouter dans la loi sur l’audiovisuel une disposition sur l’accessibilité des programmes (sous-titrage, audiodescription, langue des signes française), et de faire signer des chartes sur l’accessibilité aux nouvelles plates-formes.  Qu’en est-il ?

OLIVIER SCHRAMECK

La directive SMA n’épuise pas tous les sujets, notamment s’agissant des objectifs sociétaux de la régulation et je songe tout particulièrement à une meilleure accessibilité aux programmes d’ors et déjà mise en œuvre par les acteurs traditionnels au bénéfice des personnes en situation de handicap. Ces personnes ne doivent pas être exclues des nouveaux usages permis par internet.

MEDIA +

Le CSA propose de supprimer la règle des jours interdits de diffusion cinématographique. Qu’en est-il ?

OLIVIER SCHRAMECK

Cette règle, qui vise notamment à ne pas fragiliser l’exploitation en salle en limitant la diffusion des films à la télévision, ne correspond plus à la réalité des usages des téléspectateurs et renforce les asymétries entre les services à la demande, de plus en plus prisés, et les chaînes traditionnelles proposant des programmes linéaires, au risque de fragiliser ces dernières.

MEDIA +

Du côté des radios, vous proposez une simplification des quotas de chansons d’expression francophone «qui suscitent de nombreuses difficultés d’application». Pouvez-vous nous en parler ?

OLIVIER SCHRAMECK

Le Parlement a adopté en 2016 de nouvelles dispositions visant à encadrer plus précisément la diffusion des chansons d’expression française par les radios, notamment par la création d’un système de bonus/ malus. Les modalités concrètes d’application de celui-ci complexifient largement les dispositifs de quotas, dans un environnement concurrentiel bouleversé par la progression des plateformes de streaming musical qui ne sont pas soumises à ces obligations.

MEDIA +

Vous souhaitez évaluer «l’impact d’une réforme de la publicité segmentée et d’une éventuelle ouverture des secteurs interdits de publicité (cinéma, édition littéraire, distribution)». Pourquoi ?

OLIVIER SCHRAMECK

Pour les groupes audiovisuels, l’enjeu porte sur leur capacité à concilier leur nature de média «de masse» avec les nouvelles demandes des annonceurs, davantage tournées vers un ciblage toujours plus précis. Les initiatives récentes telles que les tests de publicité segmentée ou les solutions publicitaires interactives ouvrent de nouvelles voies de développement, mais une ouverture aurait un impact sur d’autres secteurs comme la radio qui doit être évalué.

MEDIA +

Vous proposez de renforcer les dispositifs d’éducation aux médias. Quelles sont vos idées d’actions pour renforcer ce dispositif ?

OLIVIER SCHRAMECK

Dans notre note stratégique publiée le 11 septembre, le CSA propose :

-de renforcer les actions de sensibilisation en partenariat avec les rectorats. Par exemple, nous travaillons avec l’académie de Créteil à la mise en place d’un stage pour les personnels de l’éducation nationale sur la thématique des stéréotypes femmes-hommes dans les médias. Ce type d’initiative doit être amplifié.

-de densifier son action auprès du grand public à travers les campagnes sur l’exposition des enfants aux écrans, la signalétique jeunesse, etc.

-de mener des concertations périodiques avec l’ensemble des diffuseurs et des plateformes de partage de vidéos et réseaux sociaux.